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Bemiray –« Pour que la mer ne soit plus la limite de notre rizière »

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Devoir de mémoire – 29 mars 1947, une blessure non refermée
Deuxième partie : Il n’y a pas de guerre propre…  

Retour d’exil des trois compatriotes Raseta, Ravoahangy et Rabemananjara.

Retour d’exil des trois compatriotes Raseta, Ravoahangy et Rabemananjara.

Un jour de honte nationale. Le 22 juillet 2005, Jacques Chirac, en visite officielle à Madagascar, semble à deux doigts de transmettre, officiellement, ne serait-ce que les regrets de la France,  en parlant de « périodes sombres de notre histoire commune », et d’un travail de mémoire à ne surtout pas abandonner. Son homologue malgache l’aide à faire deux pas en arrière, en répondant que, pour sa part, il préfère regarder vers le futur, puisqu’en 1947, « il n’était pas encore né ». Si au moins il avait avancé une autre raison, ou s’était exprimé autrement ! L’Histoire nationale immolée à l’autel des aides budgétaires, pour les Malgaches ce fut une deuxième défaite, cinglante et amère, car venant cette fois-ci de leur propre président (Tom Andriamanoro).

Mars 1947. La France ne devine-t-elle pas l’ampleur de ce qui se prépare, ou pousse-t-elle secrètement les évènements à la roue par un immobilisme plus que troublant   Cela conforte la thèse de ceux qui, aujourd’hui encore, penchent moins pour un soulèvement, que pour une diabolique manipulation tramée de main de maitre par le colonisateur lui-même. L’objectif est de faire tomber le vent de l’émancipation symbolisée par le MDRM, en laissant dans un premier temps la bride sur le cou ànd’authentiques nationalistes, souvent charismatiques, prêts à aller au charbon, et à l’abattoir. De nombreux documents amènent effectivement à se poser des questions. Avant les premiers assauts de Manakara, le colonel Léopold, gouverneur militaire du Sud, télégraphie de toute urgence : « Derniers renseignements : attaque générale de Madagascar dans la nuit du 29 au 30 mars. » Il n’obtient en retour aucune directive. De même, le chef du district de Fort-Dauphin informe le Haut Commissariat, de massacres en perspective, après avoir été alerté par un prêtre malgache. Silence total là aussi, aucun retour. De toute évidence, la communauté française de Madagascar, et une partie de l’administration sont, jusqu’à un certain niveau, tenues dans l’ignorance du plan machiavélique qui se monte en coulisse pour que, après les trois coups, on n’ait plus affaire à un théâtre, mais à une vraie réalité, morbide dans toute son horreur. Des années plus tard, cette vision était encore véhiculée avec constance par des intellectuels comme Jacques Rabemananjara, les mettant en contradiction avec d’autres acteurs historiques connus pour leurs réactions plus épidermiques.
Les exactions perpétrées par les forces coloniales ont été rapportées, du moins dans leurs grandes lignes, par les historiens et les témoignages oraux. Ce que l’on sait moins, c’est que, au niveau des états-majors, Madagascar a été à cette occasion un véritable laboratoire grandeur nature, où l’action psychologique fait ses premiers pas. Les « postes de pacification » qui  feront parler d’eux en Algérie, sont créés. Des tracts sont lancés au-dessus des forêts où se cachent les insurgés. En guise d’avertissement et d’intimidation, des prisonniers sont lâchés vivants à partir d’avions au-dessus des villages suspects. Les unités chargées de la pacification reviennent parfois de mission en exhibant des lobes d’oreilles. Encerclés, affamés dans la forêt, les insurgés sont décimés par les armes ou la maladie. Certains chefs se rendent, un sursis bien dérisoire, avant de mourir pour de bon dans d’autres lieux plus civilisés, camps ou hôpitaux. Dans certains commissariats de police, les collabos rivalisent de créativité à faire pâlir d’envie les factions syriennes, des dentitions partant en morceaux aux têtes plongées dans des seaux d’urine.

Moramanga est devenu une ville morte après les deux premiers jours de l’insurrection des  29 et 30 mars.

Moramanga est devenu une ville morte après les deux premiers jours de l’insurrection des 29 et 30 mars.

Exactions
Les faits imputables aux insurgés sont moins connus, car la tradition a toujours été de donner à ces évènements une version volontairement manichéiste. Ils sont pourtant  bien réels, comme les expéditions punitives, suivies d’exécutions sommaires, menées contre des villages ralliés de gré ou de force aux Français. L’écrivain Raharimanana rapporte les propos d’un ancien participant aux affrontements de Manakara, s’adressant à son père : « Tu ne me croiras jamais, Zokibe, mais je hurlais en attaquant cette concession. Leur maison brûlait, mais leurs fusils tonnaient toujours. Nous attendions que le feu les pousse dehors. Et ce qui devait arriver arriva, ils ne purent plus tenir. Ils sortirent en tirant dans toutes les directions. Et nous, nous nous sommes rués vers eux. Je me suis retrouvé face à une femme, j’ai vu un gros ventre, je n’ai pas réfléchi davantage, j’ai abattu ma machette et ai planté ma sagaie, j’ai continué à courir avec ma machette pour chercher un autre adversaire. Mais je n’ai trouvé personne d’autre, j’étais trop proche du feu, je suis revenu sur mes pas, et là, Zokibe, je n’oublierai jamais, je n’oublierai jamais. Que Zanahary me pardonne, que les ancêtres épargnent mes enfants, mais ma faute est impardonnable, on ne peut pas faire ça à un être humain… Ma sagaie était plantée dans le cou de la femme, et tout à côté, près d’elle était son bébé, sorti de son ventre ouvert, ouvert par ma machette, un bébé qui cherchait à respirer, sanglant, baigné de l’eau et du sang de sa mère. D’autres fusils sont arrivés à ce moment-là, ce n’étaient pas les nôtres, une balle a touché l’enfant par terre. J’ai fui. Je ne sais plus comment j’ai fait, je ne m’en rappelle même pas. Je me suis retrouvé chez moi. Je n’ai plus combattu. J’ai refusé de rejoindre la forêt. Mes compagnons ont tué mon neveu en représailles. Le fils de ma sœur, fils du ventre de ma sœur. Ma sœur, fille du ventre de ma mère. Je n’ai plus rien raconté depuis. Je ne raconte plus rien. Les mots sortent aussi de nos ventres. Et aujourd’hui, ma propre sagaie est plantée dans mon cou ». Et l’auteur de poursuivre : « Le silence a recouvert la maison. Mon père n’a rien dit. Il m’a semblé que le monde s’était écroulé. 1947 donc. Tant de choses qui ne sont pas dites, tant de confusion ! »
La « pacification » n’arrive à son terme qu’en décembre 1948. En vingt mois, les troubles ont touché des territoires situés majoritairement dans la partie orientale de l’île, peuplée par environ un million et demi de personnes.
(A suivre)

GERMANY-SAND-SCULPTURES-FESTIVALInsolite-La sculpture sur sable

Leur passage à Madagascar date d’il y a quelques années déjà, mais ce qu’ils ont montré sur quelques unes de nos plages, mérite encore qu’on en reparle. « Ils », ce sont Nicole Palanque, présidente de l’association Artistes itinérants du monde entier, Toni Thoniek, un Allemand qui a atterri dans l’Hérault, et Narcisse Ranarison, un Malgache établi depuis vingt ans en Martinique.
Leur spécialité, c’est la sculpture sur sable qui a vu le jour en Australie, pour ensuite essaimer aux États-Unis, au Québec, et en Europe du Nord. Comment qualifier cet art, car c’en est un à part entière, sinon qu’il est beau et éphémère,  comme la vie   Si la sculpture sur glace débute à la tronçonneuse avant de se poursuivre avec des instruments moins inquiétants, celle sur sable doit composer avec des contraintes, dont l’impossibilité de réaliser des surplombs du genre bras tendus, qui s’écrouleraient avant même de prendre forme.  Le choix des thèmes dépend pour beaucoup de l’inspiration du moment. Toni est à son aise dans les sujets religieux tels le Christ, Bouddha, ou la Sainte Cène, ou dans la reproduction de chefs d’œuvre. Nicole est un grand amateur de dessins animés, alors que Narcisse n’exclut pas la facétie. Dans son répertoire figure une sirène malgache kidnappant un touriste…
Le temps de travail peut aller d’un petit après-midi à plus de dix jours,  et dépend de la complexité du thème, de sa taille, ou encore de la qualité du sable. Pour la sortie de Spiderman et à la demande de Columbia, par exemple, le trio a réalisé en Grèce une sculpture de six mètres qui a requis trois journées ininterrompues de labeur.
Peu importe que l’œuvre ne dure qu’un moment. La sculpture sur sable est avant tout un geste, un acte de création. Elle est à la merci des intempéries, du vent, des vagues, des baigneurs. Elle est condamnée à s’évanouir petit à petit, et on s’aperçoit alors qu’il y a une beauté dans les choses qui disparaissent. Restent alors leur image, et le sable qui sera toujours là. Avec la matière on peut refaire autre chose. À l’infini.

Société – Les vols d’organes, plus que des rumeurs  

C’était dans les années 50. Du côté d’Androhibe, une église pas comme les autres était évitée comme un tombeau encore inoccupé, un « fasam-bao », par les passants. Elle était fréquentée, raconte-t-on, par des gens de la haute bourgeoisie, des « framasao », et aussi des « vazaha mpaka fo » voleurs de cœur. A-t-elle seulement existé   Trop tard pour le savoir. À la même période à Mahamasina, une famille avait pour locataire un médecin vétérinaire français que tout le quartier jurait être un « mpaka fo ». Le brave praticien n’a pourtant jamais fait que son métier, et le plus honnêtement du monde !
C’est dire que les rumeurs ont la vie dure. À force d’y croire, certains ont supprimé toute frontière avec la réalité. Plus grave, d’autres ont fini par les mettre en pratique pour on ne sait quelle finalité. Parfois peut-être pour rien. Les journaux font souvent écho de la découverte de cadavres à qui manquent le plus souvent la langue ou les parties génitales. Vrais, faux, les vols d’organes sont, heureusement serait-on tenté de dire avec soulagement, loin d’être une spécificité malgache. L’Amérique latine, par exemple, est très concernée. Entre l’Argentine et le sud de la Bolivie, des disparitions et découvertes macabres sont régulièrement mises sur le compte de ce mystérieux trafic. Au Honduras, un rein se monnaierait à 100 000 euros, et un foie pas moins de 150 000 ! Les démentis scientifiques des spécialistes de la transplantation ne peuvent rien y faire. Et pourtant, à en croire les enquêteurs qui fouillent depuis des années dans cet univers glauque, il est techniquement impossible de revendre sur le marché noir un organe volé. « C’est une légende, un mythe », n’hésite pas à affirmer le docteur Fernando Lopez Neblina, un spécialiste mexicain des greffes, qui poursuit : « Le prélèvement d’organe est une opération très délicate, qui nécessite un personnel extrêmement qualifié, et tout un protocole d’études préalables. Des tests croisés doivent être menés pour vérifier la compatibilité du donneur avec le receveur, le groupe sanguin d’abord, la compatibilité tissulaire ensuite. Il faut aussi faire des examens pour voir si le donneur ne souffre d’aucune pathologie.» On ne fait effectivement pas un prélèvement d’organe dans une cuisine ou dans une chambre d’hôtel miteux. Les chirurgiens sont formels : dans le cas du rein, il faut conserver une certaine longueur  d’artères et de veines, sans parler des prélèvements de foie ou de cœur qui sont encore plus complexes. Il ne faut pas non plus oublier le problème plus que central de la conservation, et des délais d’acheminement à la destination finale. Un organe commence à se détériorer en quelques minutes s’il n’est pas conservé dans la solution adéquate. Il est difficile de croire que n’importe quel trafiquant local, en Afrique comme en Amérique du Sud, ou ses repreneurs étrangers aussi riches soient-ils, puissent clandestinement disposer de l’équipement, et du personnel spécialisé d’une unité hospitalière de pointe. Alors
Francisco Cortazar, chercheur en phénomènes socio-urbains, explique pour sa part, que cette rumeur persistante tient sa source des accusations faites aux pays riches, d’exploiter les ressources des pays pauvres, jusqu’aux enfants et à leurs organes. Une résurgence en quelque sorte du mythe du « mpaka fo » vazaha, sauf que, pour en revenir à l’actualité de chez nous, l’aspect malgacho-malgache du vol d’organes est aussi très présent. Ne se raconte-t-il pas dans le milieu des pierres précieuses, que pour trouver un bon filon, rien ne vaut un sacrifice humain, celui d’un enfant de préférence   Cela mène à la piste de la sorcellerie et des rituels ésotériques, comme l’atteste le Pr Fernando Lopez Neblina : « Oui, il y a eu des cas d’enlèvements d’enfants et d’adultes, oui, leurs organes ont été volés. Mais il n’y a jamais eu de transplantation. Ces organes sont arrachés comme si les victimes étaient des animaux, et sont utilisés dans des rites de sorcellerie. Le parquet a retrouvé, dans des fosses communes, des corps d’enfants mutilés, j’ai vu des corps privés de cœur, de foie, et d’autres organes internes qui ne pourraient jamais servir à des interventions illégales ».

Rétro pêle-mêle

Le Lenin’Art Gallery. Trop beau, trop fou. Les artistes plasticiens manquent cruellement de lieu d’exposition, mais Viviane Rivière, une journaliste reporter qui a découvert Madagascar au cours d’un reportage pour Iles Magazine, réussit à résoudre l’équation. Tout simplement en récupérant une ancienne rizerie au niveau du rond point Vassacos à Antanimena, et en la transformant, tout en gardant certains éléments. Un vrai temple de l’art, dont l’inauguration est honorée par la présence du Premier ministre Jacques Sylla. On est en 2003, la galerie marche très fort, avec une superbe programmation comprenant expositions mensuelles, thématiques, collections permanentes, tables rondes, et ateliers. Et puis… Des contraintes familiales obligent Viviane à rentrer définitivement en France. Plus rien à l’horizon, rebonjour la bohême, jusqu’à quand

Le SCAC et le tourisme. Le Service de coopération et d’action culturelle de l’ambassade de France intervient dans le secteur touristique de Madagascar, sans interruption depuis 1993. Ce soutien se traduit principalement par un appui institutionnel apporté au ministère du Tourisme, à la Maison du tourisme, ainsi qu’à l’Institut national du tourisme et de l’hôtellerie. En ces premières années de la décennie 2000, on pourra citer au bilan la mise en place de plans d’aménagement dans les principaux sites de l’île, et la promotion d’une coopération décentralisée avec le Conseil régional Rhône-Alpes, portant sur le tourisme rural et de randonnée dans la région d’Antsirabe. S’y ajoute l’important volet de la formation, doublée d’actions de partenariat avec des institutions étrangères comme le lycée hôtelier St Paul de La Réunion, ou l’Institut de formation aux métiers du tourisme de Grenoble.

DONIALes dix ans de Donia. Le Festival culturel et musical de Nosy Be fête ses dix ans du 4 au 8 juin 2003. L’ile aux Parfums entend marquer cet anniversaire avec faste, d’autant plus que l’édition 2002 a quelque peu été en demi-teinte. Devenu le plus grand carrefour musical de cette zone de l’océan Indien, Donia fait désormais partie intégrante de l’image de Nosy Be. En plus d’être une méga fête, il tient chaque année à donner une place de choix aux droits de l’enfant, en collaboration avec l’Unicef.

Textes : Tom Andriamanoro
Photos : L’Express de Madagascar – AFP


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