Las des élections plus ou moins truquées et du pouvoir usurpé, notre chroniqueur décide de ne plus voter pour un programme. Par ailleurs, il fait l’éloge de la réussite de l’Allemagne post-Deuxième guerre mondiale grâce au deutschemark. Le fait que Bob Dylan ait obtenu le prix Nobel de littérature 2016 est l’occasion pour mettre en avant le folk song, cette musique (de) rebelle.
Politique – Pour le « tsangan’olona » et le « kara-pokontany »
La comparaison vaut ce qu’elle vaut, mais le cheminement politique de ce pays qui est encore le mien me rappelle le fleuve Namorona qui traverse le pays tanala, alternant les cours tranquilles et les chutes impétueuses. Je pense aussi au Maningory, un autre fleuve inconnu des Malgaches mais apprécié des adeptes vazaha du rafting en eau vive, qui parcourent une quarantaine de kilomètres en deux jours en passant par d’impressionnantes vagues qu’ils classent, en connaisseurs, dans les très sérieuses catégories IV ou V. Et je ne sais que trop pourquoi le « tsy maintsy mipoaka ny sarom-bilàny » du poète gardera longtemps encore toute son acuité prémonitoire…
Une chose que je ne m’explique que difficilement, par contre, c’est cette amnésie aiguë, digne d’Alzheimer, que je constate dans des milieux où on l’attend le moins. Mais peut-être n’est-elle que bassement partisane , ce qui finalement explique tout C’est le cas de cette obsession à ne diaboliser que les évènements les plus récents, alors que les précédents étaient eux aussi loin, très loin d’être conformes à l’orthodoxie constitutionnelle. Madagascar n’a jamais connu de vrais « Coups d’État », réussis ou avortés, à la Samuel Doë, Jerry Rawlings, Yahya Jammeh, ou autres général Diendéré. Sauf peut-être en 1975 avec l’assassinat du Chef d’État en exercice. Les potentats au pouvoir ont dû en inventer, aux frais des commandant Andriamaholison, capitaine Abel Rakoto, ou encore Gaston Ramaroson. À Madagascar, c’était plutôt des mouvements populaires, l’armée observant le sens du vent avant de se rallier, pour ne pas se retrouver seule à contre-courant. Ces élans se sont, tout aussi invariablement, caractérisés par de grandes marches pacifiques vers les hauts-lieux de l’Exécutif : Andafiavaratra en 1972, Mavoloha en 1991, Mahazoarivo en 2002, Ambohitsorohitra en 2009. Une chance du présent régime est peut-être que la liste est close, mais sait-on jamais… Lesquels d’entre eux étaient alors plus putschistes que les autres, d’autant plus que les meneurs se sont souvent retrouvés dépassés par la foule au nom du « Zao dé zao » Un bel héritage de qui l’on sait.
![Les manifestations populaires, dont celle de 2009, sont considérées par certaines personnes comme des « Coups d’État ».]()
Les manifestations populaires, dont celle de 2009, sont considérées par certaines personnescomme des « Coups d’État ».
Démocratie directe
Le bourbier actuel où s’enlise Madagascar prouve, si besoin est, qu’après avoir promené la crise malgache dans presque toutes les grandes métropoles d’Afrique australe, les doctes Mozambicains ont lamentablement échoué à la résoudre : grave erreur médicale, ils avaient imposé une solution électorale à un problème qui ne l’était pas ! Car en matière d’élections, les Malgaches, un brin fatalistes et contrairement aux Africains qu’on nous oblige à être, ont toujours fini par accepter pacifiquement les résultats, même les plus invraisemblables. Le cas le plus flagrant en est le référendum du 28 septembre 1958 dont les résultats ont été validés en quinze jours, pour donner naissance à la Première République le 14 octobre ! Il y en eut d’autres, pour ne pas dire qu’il n’y eut « que ça ». Même le 13 mai 1972 a été une révolte non pas contre les plus de 90% obtenus par le Président quelques mois auparavant, mais contre les « Accords d’esclavage », et le célèbre « sekoly miangatra». Les révélations de « l’homme au chapeau de paille » sur la victoire qu’on lui a volée en 1997 confirment que les Malgaches sont ainsi faits : ils vous jugent à l’œuvre et vous jaugent d’abord patiemment, avant de laisser éclater le couvercle de la marmite. Même tout dernièrement à Ampasimbe Manantsatrana, il s’agissait, avant tout, d’un ras-le-bol généralisé contre les dérives autoritaristes. Si ce n’est pas de la démocratie directe authentique, Dieu que ça lui ressemble…
Des élections il y en a donc eu, et il y en aura. Personnellement, ayant trop souvent vu le pays passer d’une élection truquée à un pouvoir usurpé, je suis de ceux qui ont décidé de voter
désormais pour des hommes – ou des femmes -, mais plus pour des idées. « Tsangan’olona amin’izay fa tsy tsanga-kevitra e ! » Trop facile de concocter sur la table un programme inédit de développement et de ne pas être capable de l’appliquer. Trop beau de promettre le plein respect des lois, sauf, qu’en fait, on l’exigera toujours des autres et jamais des siens. Je radiographierai le candidat jusqu’aux tréfonds possibles de sa vie privée, je violerai le secret de ses rapports avec l’argent et avec Dieu car le Malgache y est ultrasensible : exit les pharisiens ! Et surtout je ne l’écouterai pas : sa campagne électorale, je l’aborderai avec des boules Quiès dans les oreilles, et les yeux hors de leurs orbites. Les Américains l’ont aussi compris, ils caricaturaient Trump en éléphant et ont découvert que c’était un cochon. Le coup de grâce.
On a enfin beaucoup tourné en dérision les « kara-pokontany » utilisés lors du dernier referendum constitutionnel, oubliant que ce n’était pas une règle édictée, mais une mesure prise en catastrophe, sous la pression des omis de la liste électorale. Ce n’était pas parfait, mais il peut quand même y avoir du bon à retenir, la refondation dont tout le monde parle ne pouvant passer que par une revalorisation de ces structures de base bien malgaches et solidaires que sont le Fokontany et le Fokonolona. Ce « karatra » devrait être, désormais, une pièce obligatoire lors des prochains scrutins. Bien géré, il pourra être la balise empêchant que des Rakotofetsy votent à 8h à Andoharanofotsy, à 11h10 à Ambatofotsy, et à 15h23 à Ankadifotsy…
![Mahaleo a suivi les traces de Bob Dylan et autre Simon and Garfunkel.]()
Mahaleo a suivi les traces de Bob Dylanet autre Simon and Garfunkel.
Art – Le folk song, musique rebelle
Dans les années 60, on qualifiait cette musique pas comme les autres de folk, de folk contemporain, ou encore de folk revival. Contestataire dans le fond, acoustique dans la forme, éminemment poétique, elle a aligné aux États-Unis ces véritables icônes que sont Joan Baez, Leonard Cohen, Peter Seeger, et surtout le plus grand, l’immense Bob Dylan. Au Canada, le Whinnipeg Folk’s Festival continue à drainer, depuis les années 70, un public de fidèles venus de tout le continent. En Europe, 1964 est retenu comme la vraie date de départ avec des noms comme Malicorne, Mélusine, et surtout Hughes Aufray qui y greffa souvent des influences sud-américaines. À Madagascar et les évènements de 72 aidant, on citera la trilogie Mahaleo, Lolo sy ny Tariny/Eric Manana, et Tsialonina. Dans tous les pays, les instruments de base du folk sont la guitare, le banjo, la mandoline, et l’harmonica, qu’on peut amener facilement sur les « tamboho ». Si les Bretons ont bien réussi à y intégrer la cornemuse et la vielle à roue, on peut s’étonner de la présence plutôt timide de notre valiha nationale chez nos représentants.
Bob Dylan, Robert Zimmerman de son vrai nom, est aujourd’hui encore la figure de proue de cette école qui résiste à l’usure du temps, et beaucoup de grandes pointures de la scène se réclament de son influence : David Bowie, Neil Young, Paul Simon, Bruce Springsteen… D’autres, toutes générations confondues, ont puisé dans son répertoire, pour ne citer que les Beatles, Elvis Presley, ou les Guns N’Roses qui, pour la petite histoire, possèdent un morceau intitulé « Madagascar ». Mais lui-même ne renie pas des racines le menant au blues de Jimmy Reed, de Muddy Waters, ou de John Lee Hooker, qu’il qualifie de « guitariste incroyable ».
Pour dire vrai, Dylan a une voix monotone, rauque, parfois pas très juste, mais qui accroche et séduit. Il devient rapidement le porte-parole d’une génération excédée par les inégalités, les injustices, et le conservatisme de la société américaine. Il participe aux côtés de Joan Baez et de Mahalia Jackson à la fameuse marche durant laquelle Martin Luther King prononça son fameux « I have a dream ». Mais son engagement ne l’empêchera pas de composer des chansons plus intimistes comme « Girl from the north country », ou « Don’t think twice it’s all right », qui deviendront « La fille du Nord », et « N’y pense plus, tout est bien » une fois traduites par Hughes Aufray.
Le 13 décembre 1963, Bob Dylan reçoit le Prix Tom Paine récompensant « une personnalité qui a symbolisé le juste combat pour la paix et l’égalité ». Il n’aime pas trop, et se sent comme pris dans un piège. « J’ai regardé le parterre et j’ai eu la trouille ». Qui sait, c’est peut-être pour cette même phobie des honneurs qu’il ne semble guère pressé de prendre possession de son Nobel…
![En tant que monnaie fiduciaire, le deutschemark a eu cours jusqu’au 31 décembre 2001.]()
En tant que monnaie fiduciaire, le deutschemark a eu cours jusqu’au 31 décembre 2001.
Monnaie – Et le Deutschemark ressuscita l’Allemagne
Il fut un temps où les peuples de tous les pays avaient l’habitude de se situer chronologiquement par rapport à de grands évènements historiques. En France, par exemple, on se référait volontiers, dans les années cinquante, à la libération de Paris. Chez les Malgaches, les aïeux avaient pour repère l’attaque du pouvoir colonial local, d’obédience pétainiste, par les troupes alliées.
« Fony niakatra ny Anglisy… » L’habitude ne s’est pas tout à fait perdue, puisque l’Amérique, et avec elle le monde, parlent aujourd’hui d’une seule voix de « l’avant et de l’après 11 septembre ».Les Allemands de la période de reconstruction nationale après les dures années de l’après-guerre n’avaient, eux, qu’une date à l’horloge de leur mémoire : celle de la « Wahrungsreform », ou réforme monétaire, du 20 juin 1948. C’est ce jour-là, en effet, que le pays recommença à espérer, et à vivre.
![Le chancelier Konrad Adenauer (à dr.) a été à l’origine de la réussite économique de l’Allemagne à partir de 1949, et l’artisan avec le général Charles De Gaulle (à g.) de la réconciliation définitive de son pays et de la France.]()
Le chancelier Konrad Adenauer (à dr.) a été à l’originede la réussite économique de l’Allemagne à partir de 1949, et l’artisan avec le général Charles De Gaulle (à g.) de la réconciliation définitive de son pays et de la France.
Durant trois longues années, ils n’avaient pu faire mieux que survivre, réduits à maudire aussi bien les vainqueurs que leur propre gouvernement accusé d’être contre-nature, « germaniquement » parlant, car trop docile. Le Reichsmark était devenu, par la force des choses, une monnaie sans valeur que les commerçants traitaient de haut. Le vrai étalon monétaire était… la cigarette, ce petit tube de papier sali et froissé, qui passait de main en main. Une cigarette pour un morceau de pain noir, deux pour quelques rondelles de saucisson, et ainsi de suite. Et ce fut au dernier jour du printemps 1948 qu’éclata la nouvelle, telle un coup de tonnerre rédempteur qui allait balayer le ciel de tous ces nuages. Le Reichsmark était retiré du circuit, une autre monnaie était née dont le nom même flattait l’orgueil national trop longtemps enfoui : le Deutschemark.
Lorsque les vieux billets furent tous récupérés, l’Allemagne de l’Ouest devint étrangement le symbole, pendant quelques heures, d’un communisme on ne peut plus parfait. Chaque citoyen se promenait avec la même somme en poche : 40 D.M. C’est ce que l’État lui octroyait pour prendre un nouveau départ dans la vie. Les comptes en banque furent restructurés. Celui qui avait droit, par exemple, à une prime d’assurance-vie de 5 000 Reichsmarks, recevait, en contrepartie, 500 D.M. En plus des 40 D.M, les caisses de l’État distribuèrent encore un montant équivalant à 6,5% des impôts payés en Reichsmark. Celui qui payait avant la Wahrungsreform 10 000 R.M recevait un bonus de 650 D.M.
« Le renard gris »
Quand chacun eut compté et recompté ce qui lui revenait, on assista à une chose stupéfiante. Les devantures des magasins, jusqu’alors désespérément vides, se garnirent comme par enchantement des denrées que les commerçants ne sortaient qu’au compte-gouttes auparavant. Quelques jours, quelques heures parfois, suffirent pour que les 40 D.M se métamorphosent en cochonnailles, en montagnes de choucroutes, en cascades de bière. L’Allemand, ce jouisseur, se sentait revivre. Et si, pendant cette «Fressewelle », ou vague de ripailles, il a pu y avoir des victimes, ce ne fut sûrement plus de faim, mais d’indigestion… Un autre effet de la réforme monétaire ne tarda pas à se faire sentir. Les usines qui tournaient jusque-là au ralenti, se mirent à fonctionner à plein rendement. La production monta en flèche, le nombre de chômeurs diminua d’autant. Tout le monde se remettait au travail avec confiance, sans oublier l’essentiel : manger, encore et toujours. Les salaires y passaient jusqu’au dernier pfennig.
Un nom est indissociable de cette résurrection d’une Allemagne qui mit moins de temps que ses vainqueurs pour se relever (dix ans à peine !), et dont le Deutschemark parvint à devenir, dans le même laps de temps, une des monnaies les plus sûres d’Europe : le Chancelier Konrad Adenauer surnommé « der graue Fuchs », le renard gris. En 1945, les Britanniques le chassèrent de son fauteuil de maire de Cologne pour « incompétence, manque d’énergie, et non coopération ». Avis totalement contraire d’un diplomate français pour qui « cet homme ira loin, très loin ! Il a l’œil gauche fixé sur l’ambassade de Grande-Bretagne, l’œil droit sur la nonciature, et les mains tendues vers l’industrie de la Ruhr ». En langage plus clair, il donnait la priorité au développement de l’Allemagne tout en restant sur le qui-vive. Un vrai renard. Élu Chancelier en 1949 à une seule voix de majorité, il n’a cessé depuis d’affermir son rôle. Gouverner, aimait-il répéter, n’est pas une affaire d’ignorant, de « vulgum pecus ».
Après la « Fressewelle » vint la « Kleiderwelle », autrement dit la vague vestimentaire. Et lorsque les Allemands se furent décemment habillés, ils se sentirent des fourmis dans les jambes. Ce fut la « Reisewelle », la frénésie des voyages. Les autocars étaient pris d’assaut, les agences de voyages se mirent à pousser comme des champignons. Petit à petit, l’Allemagne du tourisme grignota les places jusqu’à un rang qu’elle ne devait plus quitter : l’allemand TUI est aujourd’hui un des plus grands voyagistes mondiaux dans la tradition initiée par Thomas Cook, alignant dans la première décennie de ce 21e siècle la bagatelle de 84 TO, 3 600 agences de voyages, 285 hôtels, 104 avions. Difficile de faire mieux.
Rétro pêle-mêle
Les missions de l’ASECNA sont définies par la Convention de Dakar de 1974, notamment dans ses articles 2 pour les missions communautaires, et 10 pour les activités nationales en vertu de contrats particuliers passés avec chaque État membre. Parmi les avantages offerts par l’appartenance à cet ensemble figurent une approche homogène dans la prise en compte des investissements communautaires, et la facilitation du dialogue avec les principales sources de financement internationales. L’Agence a, par exemple, été le premier organisme africain à bénéficier d’un prêt sur ressources propres de la Banque européenne d’investissement (BEI). Mais ne voilà-t-il pas qu’à Madagascar en 2003, quelques techniciens de la Vice-Primature conduits par le secrétaire général, un proche parmi les proches des rêveries du Président de l’époque, échafaudent un plan de retrait, avec pour solution de rechange la création d’une sorte d’ASECNA-bis au niveau de la … COMESA ! Devenu, par la suite, le patron des Transports, cette même personne peaufine son plan à courte vue, avec comme date-butoir le mois de mai 2008. Il a fallu une somme incalculable de courbettes auxquelles le Président n’était pas du tout habitué, pour effacer cette tentative de partition, et rassurer les Africains de la volonté de Madagascar de rester au sein de l’Agence multinationale.
Les compagnies dites « low cost » ont littéralement révolutionné le monde du transport aérien. La première, l’américaine Southwest Airlines, date de 1972. Bénéfices ininterrompus pendant trois décennies, achat de 29 avions en 2005 malgré la concurrence et le prix du carburant… Il y a en fait trois types de « low cost » : les « radicales » comme Ryanair (un seul type d’avion, un service à bord minimal, utilisation d’aéroports secondaires), les plus « ouvertes » comme Easyjet et Volare (possibilité d’opter pour d’autres types d’avion et des aéroports plus grands, investissements en marketing…), et les « hybrides » issues des compagnies traditionnelles et qui en ont gardé la culture d’entreprise. Au début des années 2000, on comptait plus d’une centaine de compagnies « low cost » dans le monde, dont 56 en Europe de l’Ouest, et 16 aux États-Unis. Du côté des compagnies aériennes classiques confrontées à différentes contraintes et souvent endettées, on a assisté entre 1997 et 2000 à l’éclosion de trois alliances principalement pour des raisons d’économie d’échelle : Star Alliance (Air Canada, ANA, Lufthansa, SAS, United Airlines…) , Oneworld (American Airways, British Airways, Cathay…), et Skyteam ( Air France-KLM, Alitalia, Delta Airlines…) Textes :
Tom Andriamanoro
Photos : L’Express de Madagascar – AFP