Bemiray de ce samedi est consacré aux Juifs de « l’extérieur » (pas la diaspora) dont les falashas d’Éthiopie qui ont émigré en Israël avec une intégration difficile, mais aussi des « Israélites de Madagascar » expulsés successivement du By Pass, de Maevatanàna et d’Ambato Boeny sans pour autant exprimer le désir de rejoindre Canaan. Tom Andriamanoro se pose la question sur le bonheur et l’homme heureux.
Racines – Il paraît que je suis juif…
Cela n’a même pas été un fait divers. Quand cette congrégation d’illuminés s’autoproclamant « les Israéliens de Dieu » avait été expulsée manu militari de dessous d’un pont du By Pass qu’ils avaient transformé à la fois en dortoir, en synagogue, et en lieu d’aisances, pas un seul des badauds sommeillant dans chaque Tananarivien n’en a eu cure. Ont-ils pu se reconstituer Où sont-ils partis avec leur accoutrement naïvement inspiré des téléfilms Loin de cette obsession de petites gens qui tient plus d’une lecture mal assimilée des Saintes écritures que d’autre chose, la « question juive », avant tout racinaire, est souvent prise très au sérieux, non seulement par une certaine intelligentsia malgache, mais aussi sous d’autres cieux.
Condoleezza Rice. Qui ne se souvient de cette diplomate toujours entre deux avions l’emmenant au chevet de toutes les crises politiques du globe Professeur d’université, pianiste émérite à ses trop rares heures de loisirs couronnées par une prestation avec la grande Aretha Franklin, secrétaire d’État de l’administration Bush, cette célébrité paradoxalement très anti-star aurait des ascendances falashas, même si sa biographie est plutôt muette à ce sujet. Les falashas, ces « Juifs éthiopiens » également appelés Beta Israël, ont une origine assez mal définie, aux confins de la légende. Selon une première version, ils descendraient d’Israélites ayant accompagné le prince Ménélik, fils du roi Salomon et de la reine de Saba, quand celui-ci apporta l’Arche de l’Alliance en Ethiopie. Une autre thèse les désigne comme des descendants de la tribu de Dan, une des dix tribus « perdues » déportées
![Le secrétaire d’État américain de George W. Bush, Condoleeza Rice, serait d’origine falasha.]()
Le secrétaire d’État américain de George W. Bush, Condoleeza Rice, serait d’origine falasha.
par les Assyriens en 722 av JC. Cette version a été agréée par le grand rabbinat d’Israël en 1973. Une troisième version les place dans la lignée d’un groupe d’Hébreux qui aurait refusé de suivre Moïse lors de la sortie d’Égypte. Habitant dans les provinces éthiopiennes du Tigré et du Gondar, dont le palais royal était, à une certaine époque, le deuxième plus haut édifice d’Afrique après le Palais de la Reine d’Antananarivo, les falashas tiennent leur culte non pas dans des synagogues, mais dans des « masgid », un mot probablement dérivé de « mosquée ». Leurs pratiques sont encore plus strictes que celles du judaïsme orthodoxe, les hommes chargés d’un enterrement devant, par exemple, s’isoler pendant sept jours pour se purifier.
Origine biblique
À partir du 19è siècle, leur ethnie, très courtisée, fait l’objet d’une intense surenchère entre christianisme et judaïsme. La London society for promotion of christianity among the Jews s’installe, par exemple, dans cette partie septentrionale de l’Éthiopie, mais ne connaît qu’un succès assez relatif. Une contre-mission est aussitôt dépêchée par la concurrence, proclamant la judaïté de ces Beta Israël, leur ouvrant des écoles juives, et prêchant leur retour en Palestine. Contrairement à tout le continent africain au Sud du Sahara, ils ne se considèrent pas comme Noirs, mais comme « Gey » (Rouges), ou « T’eyem » (Brun). En 1975, le gouvernement d’Itzhak Rabin accepte officiellement le caractère juif des falashas, et leur ouvre le bénéfice de la « Loi du Retour » permettant à tout Juif du monde entier d’émigrer en Israël. Au recensement de 2009, ils y sont au nombre de
110 000, mais l’intégration n’a pas toujours été facile, en raison des trop grandes différences culturelles.
Cette émigration en Israël, il n’est à l’idée d’aucun « Juif malgache » de la revendiquer, le débat restant ici au niveau d’une théorie parmi d’autres du peuplement de l’île. Il y a quelques années de cela, l’association Hanitry ny Ela avait organisé des journées portes ouvertes au Cite d’Ambatonakanga, destinées à démontrer l’origine juive d’au moins 70% des Malgaches. Elle apportait comme arguments de nombreux éléments empruntés à l’histoire, à la langue, et aux traditions. Cette thèse est aussi celle défendue, depuis toujours, par le pasteur Tolotra de l’Université de Münster en Allemagne, à cette nuance près qu’il donne la priorité à l’approfondissement d’indications d’origine biblique. Le pays d’Ofir, d’où les marins du roi Hiram ramenèrent de l’or pour le temple de Salomon, est situé par la Bible soit au Sud de la péninsule arabique, soit sur la côte Est-africaine. Il pourrait bien être Madagascar, ce qui jetterait une lumière aussi minime soit-elle sur les inscriptions proto-hébraïques d’Alakamisy Ambohimaha toujours non élucidées. Les noms de beaucoup de rescapés du Gola, ou exil à Babylone (faha-gola ), sonnent bien malgache, pour ne citer que les Zato, Parosy, Babay, ou Imera. L’Arche de l’Alliance n’a jamais pu être trouvée par Nabuchodonosor, pour la simple raison qu’elle a été mise en sûreté à Madagascar en entrant par Maroantsetra, un mot signifiant « port principal » en hébreu. Sous la Première République, l’homme d’affaires israélien Mimram des Grands Moulins de Dakar a fait de véritables coupes sombres dans les forêts du Nord-Est, officiellement pour l’exportation, en réalité pour retrouver cette Arche que, lui aussi, pensait être à Madagascar.
Le pasteur Tolotra a trouvé des équivalences juives étonnamment proches de pratiquement tous les noms d’ethnies de Madagascar. Il n’est pas jusqu’au juron de « chien mort » (alika maty) familier aux Malgaches qui ne soit rapporté dans la Bible, tout comme l’exhumation (Exode 13 : 19). Beaucoup de croyances et de rites des religions traditionnelles malgaches se retrouvent dans l’Ancien Testament, à cette déviation près que le « Dieu des Ancêtres » est devenu « Dieu et les Ancêtres ».
À chacun ses préoccupations. À mille lieues de celles des érudits, les « Israéliens de Dieu » déguerpis du By Pass ont été retrouvés, en ces premiers mois de 2016, d’abord à Maevatanàna, ensuite à Ambato Boeny. Aucun papier d’identité, aucun titre foncier. Et comme d’habitude, ils ont été priés de chercher leur Canaan un peu plus loin…
![Le parcours d’Andakana du Golf du Rova se trouve dans un paysage vallonné, typique de l’Imerina.]()
Le parcours d’Andakana du Golf du Rova se trouve
dans un paysage vallonné, typique de l’Imerina.
Sports – Perspectives golfiques
Elle a beau être à l’autre bout du monde, mais peut-être pour cette raison, cette zone Ouest de l’océan Indien a, depuis longtemps, acquis ses lettres de noblesse dans le milieu réputé exigeant du golf. Exotisme, paysages de rêve qui ne doivent surtout pas distraire les joueurs, parcours souvent très techniques et, ce n’est pas le moindre des attraits, proximité d’excellentes unités d‘hébergement et de restauration confirmant l’indissociabilité grandissante de la paire gagnante golf-hôtel, tous les atouts sont là. Quelques exemples À La Réunion, le Golf Club de Bourbon doit déjà réfléchir à la meilleure façon de fêter bientôt son demi-siècle d’existence. Parcours le plus mûr des Mascareignes, il a, depuis longtemps, confirmé sa vocation internationale, expliquant sa facilité à attirer les plus prestigieux partenaires. On pourrait aussi citer le Golf du Bassin Bleu, ou celui du Colorado, très actif dans l’encadrement et la motivation des jeunes. Tous sont sur la short-list des tour-operators spécialisés comme Greens du Monde ou Golfissimes. Maurice, avec la douceur de son climat, ses pluies peu abondantes mais régulières, et surtout sa tradition britannique, est une île faite pour ce sport très particulier. Belle Mare Plage, un « resort » avec son green à 200 m de la mer, ou le Paradis Golf Club, un « 18 trous » qui offre en un seul parcours trois décors totalement différents, sont autant de références très courues.
À Madagascar, le concept mer-golf-hôtel a atteint une nouvelle dimension avec l’Azura Golf Resort de Foulpointe, le seul en bord de mer de l’île. Celui d’Antsirabe, un « raiamandreny » né en 1935 sur un versant du mont Ivohitra et réhabilité en 1987, est aujourd’hui niché au cœur d’une immense pinède grâce à un reboisement réussi. La capitale aligne le Malaza Golf Club près d’un village où, raconte-t-on, les jeunes nobles d’antan choisissaient leur future épouse, et surtout le Golf du Rova, à une vingtaine de kilomètres sur la RN4, qui déroule les 5 800 m de son parcours dans un paysage vallonné typique du pays de l’Imerina. Tracé de 1951 à 1958, ce magnifique « 18 trous » parsemé d’obstacles naturels permet de travailler en profondeur toutes les techniques. Les habitués savent déjà par cœur qu’il faut bien calculer la distance pour le trou n°4 qui survole un « canyon » de 150 m entre le tee et le green, ce dernier étant entouré à sa base par trois bunkers, que les greens des trous n° 5, 12, et 14 sont invisibles au second coup, ce qui accentue leur difficulté, que le dog-leg du n°3 exige un départ minimum de 210 m, ou que celui du n°14 est droit, puis ascendant vers la droite. Mais est-ce bien suffisant de le savoir Tout le monde ne sera pas un Nick Faldo ou un Tiger Wood. Mais pour parler comme l’entraineur français Olivier Morio, « pour se faire plaisir dans cette activité, minimisez l’importance du score ou des bons coups, car il ne faut pas oublier vos partenaires, la beauté des sites, et beaucoup d’autres choses ».
Bonheur – Pauvre, corrompu, heu-reux !
![Le Bhoutan des moines tibétains a instauré la notion d’indice du « bonheur national brut ».]()
Le Bhoutan des moines tibétains a instauré la notion d’indice
du « bonheur national brut ».
Le couple le plus heureux du monde, le duc et la duchesse de Cambridge, alias William et Kate tout simplement, était en ce début, d’avril, pour deux jours au Bhoutan, un minuscule Etat himalayen, célèbre pour son indice de « bonheur national brut ». Enclavé entre l’Inde et la Chine, le Bhoutan ne fait guère plus de 40 000 km2 de superficie pour une population de 750 000 habitants. Malgré la pauvreté et la corruption qu’il est difficile de maquiller, il semble faire du bonheur une obsession nationale. Les deux religions prédominantes, à savoir le bouddhisme tibétain et l’hindouisme, en sont les piliers, au point que la minorité népalaise, à majorité musulmane donc pollueuse, a fait, en 1990, les frais de cette hégémonie : 400 morts, plus de 100 000 personnes jetées sur les routes de l’exil.
L’indice de « bonheur national brut » a été instauré en 1972, et s’appuie sur quatre principes : le développement économique responsable, la conservation et la promotion de la culture nationale, la sauvegarde de l’environnement et la promotion du développement durable, et enfin, la bonne gouvernance. Rien de bien nouveau qui ne soit également seriné ailleurs dans les intentions gouvernementales, même à… Madagascar. Le prix du bonheur à la bhoutanaise est plutôt cher à payer : le réseau routier y est plus que rudimentaire. Le pays est le dernier au monde à avoir eu accès à la télévision et à internet, la condition émise étant qu’il contribue au bonheur général. Le premier aéroport n’a été ouvert qu’en 1992. Les législatives de 2008 ont été gagnées par le Parti Vertueux (sic) qui a raflé 44 sièges sur 47. Malgré tout cela, le Bhoutan a reconnu, en 2013, être confronté à au moins trois grands défis : l’endettement, le chômage des jeunes, et la corruption grandissante. Deux points positifs néanmoins : les timbres-poste aux formes originales, très recherchés par les philatélistes, et le système de santé entièrement gratuit quelles que soient les maladies. Ce n’est pas rien, mais qu’on enlève les slogans et les pseudo-indices, et le Bhoutan sera finalement un pays sous-développé comme un autre…
« Miadana »
Si ce n’est pas le Bhoutan, quel serait-donc le pays le plus heureux de la planète Selon une enquête mondiale réalisée par le très sérieux institut de sondage Gallup, ce n’est ni la Suisse, ni un des pays nordiques, mais… le Paraguay : un mythique eldorado qui a vu l’afflux non seulement d’anciens nazis, mais aussi d’Irlandais, d’Australiens, de Finlandais en mal de bonheur. Sept millions d’habitants, un territoire grand comme deux fois l’Allemagne, des mangues qui pourrissent par terre, des exportations de viande dépassant de loin celles de l’Argentine, une production d’électricité dix fois supérieure aux besoins réels, et pourtant…
Et pourtant, la corruption est ici partout. Elle gangrène toute la vie publique : ministres, fonctionnaires, magistrats, policiers… Même le président paraguayen n’a pas eu de honte à avouer qu’il s’est présenté uniquement parce qu’il ne savait plus que faire de ses millions. Le héros national, Francisco Lopez, mort en 1870 et dont on honore chaque année la mémoire, était un dictateur sanguinaire qui fit exécuter des milliers de personnes, y compris au sein de sa propre famille. Aujourd’hui, les plus grandes avenues de la capitale portent son nom et celui de sa femme. Mais les Paraguayens sont heureux, car dans la tradition des Indiens Guaranis, on vit l’instant présent sans trop se poser de question. Le mot « demain » n’existe
![Le couple William-Kate, le duc et la duchesse de Cambridge, devant le Taj Mahal, serait le couple le plus heureux du monde.]()
Le couple William-Kate, le duc
et la duchesse de Cambridge,
devant le Taj Mahal, serait le couple le plus heureux du monde.
d’ailleurs pas dans leur langue, remplacé par celui de « koera » qui veut approximativement dire « si jamais le jour se lève ». C’est leur philosophie ancestrale d’une « terre sans mal », et un journaliste paraguayen a même reconnu que « l’aveuglement est un des caractères les plus marquants de notre tempérament ». Au Paraguay, on est malheureux uniquement quand on désire l’impossible. C’est pourquoi on y enregistre chaque jour le suicide de jeunes âgés de 15 à 25 ans. La raison de leur geste Avoir croisé, et envié, d’autres jeunes chaussés de baskets de marque et arborant leur portable, autant de choses qu’ils n’ont, ou ne pourront jamais avoir.
Est-on heureux uniquement parce qu’on ignore qu’on ne l’est pas La question est posée. Il est malheureusement plus que probable que le vrai bonheur n’est ni au Bhoutan, ni au Paraguay, encore moins les enfants malnutris de nos écoles publiques, qui chantent au lever des couleurs : « Hiadana sy ho finaritra, e sambatra tokoa izahay ».
Rétro pêle-mêle
Jacob Zuma, nouvel homme fort de l’ANC . 2007, le nouveau patron de l’ANC est un géant aux pieds d’argile. Malgré sa popularité, on ne donnait pas cher de sa carrière après son procès pour viol en 2006, et les soupçons de corruption pesant sur lui dans le cadre d’un contrat d’armes où il aurait touché 2,5 millions de rands. L’affaire remonte à 1999, mais c’était compter sans sa capacité de rebondir dans ce qu’il présente comme un complot judiciaire orchestré par son rival Thabo Mbeki, dont il est la parfaite antithèse. Mbeki est un intellectuel austère, homme des statistiques, tandis que lui, Zuma n’a guère fait d’études, et n’est à l’aise que sur le terrain au contact des militants. Le Parquet ne lâche pas prise, et fait savoir que de nouvelles preuves le concernant ont été apportées par des enquêteurs d’élite. Neuf ans après, qu’est-ce qui a changé
Une soirée télé à Hararé. Le rite est immuable, sur la Zimbabwean Broadcasting Corporation . La sacro-sainte heure du journal télévisé du soir est une messe de propagande parfaitement régentée. Ministres, officiels, et pseudo-analystes s’y succèdent pour chanter les louanges de Robert Mugabe et vilipender Morgan Tsvangirai, ce valet des impérialistes qui veulent recoloniser le Zimbabwe. Les sanctions occidentales, seules responsables des malheurs du pays, sont inlassablement dénoncées, avec parfois le concours d’artistes et d’écrivains. Les hommes d’église n’échappent pas à la réquisition présidentielle pour démontrer, versets à l’appui, que c’est Dieu en personne qui choisit les rois de ce bas monde.
Il était une fois le Puntland. Dans ce coin de Somalie encore épargné du chaos, l’activité de pointe dans le privé est l’impression de shillings somaliens. Elle se fait dans de luxueuses villas, sans le moindre contrôle officiel, et génère un déséquilibre permanent du taux de change et une inflation récurrente. Ce sont de puissants hommes d’affaires gardés par des miliciens armés jusqu’aux dents qui décident du moment et de la quantité de billets à produire. Au lieu de les commander à l’extérieur, ils ont trouvé plus simple d’importer les machines, et de tout faire sur place…
Textes : Tom Andriamanoro
Photos : L’Express de Madagascar – AFP