Le bois énergie (Bois de chauffe et charbon de bois) demeure vital pour la majorité des Malgaches qui l’utilisent au quotidien. Dans les villes et leurs zones périphériques, le charbon de bois reste le plus prisé pour la cuisson quotidienne des ménages, car difficilement remplaçable par d’autres sources de combustibles de cuisson.

Tout le monde le sait, la fabrication du bois énergie met en danger l’environnement en général, les arbres en particulier.
Le chiffre d’affaires du marché du charbon de bois frôle les 400 milliards ariary durant l’année 2015, selon les estimations (GIZ-Eco). Ce chiffre illustre à lui seul toute l’importance économique du secteur à Madagascar. Un ménage dans la ville d’Antananarivo consomme environ 40 kg de charbon par mois, ainsi les dépenses mensuelles relatives à l’achat de combustibles occupent une part importante des dépenses moyennes mensuelles du ménage.
Selon les enquêtes menées dans certaines localités, l’augmentation annuelle du prix du charbon de bois a été de 10 % entre 1988 et 1989, de 25 à 30 % entre 2004 et 2006, soit 15 % par an, et de 45 % entre 2006 et 2012, soit environ 9 % par an. Entre 1988 et 2012, on a observé une fluctuation annuelle plus ou moins régulière qui varie sensiblement entre 9 et 15 %. Mais, depuis quelques mois, le prix du charbon sur le marché a connu une hausse vertigineuse dans la grande ville d’Antananarivo.
Ceci a doublé en un laps de temps record. Du fait que c’est une denrée essentielle, le produit connait souvent un accroissement en valeur. Mais il est à déplorer le fait que les prix sont dictés par les intermédiaires et les acteurs en aval de la chaîne de valeur, notamment les collecteurs, opérateurs économiques, etc. Ils accaparent une grande partie des bénéfices (AIDES, 2016).

Avant d’arriver dans chaque ménage utilisateur, le charbon «se consume lentement», est mis dans des sacs, puis transporté en ville, chez les grossistes et enfin chez les détaillants, pour y être vendu.
Déséquilibre
Généralement, les consommateurs s’approvisionnent en charbon de bois tous les jours, selon l’étude menée par le cabinet AIDES en 2015. Seuls quelques ménages (salariés mensuels et fonctionnaires) ont la capacité d’effectuer un approvisionnement hebdomadaire ou mensuel. Cette situation est fortement liée à la faiblesse du pouvoir d’achat des Malgaches. Ainsi, les utilisateurs n’ont pas vraiment de choix sur les produits à acheter et s’approvisionnent auprès des revendeurs les plus proches de leur domicile. La majorité des achats par les ménages se font au détail, avec le système doseur de 250 à 500 g (pour 92,95% de la population enquêtée). Ceci nécessite la proximité de la fourniture de produits bois-énergie. C’est la raison pour laquelle les points de vente s’éparpillent dans tous les coins des quartiers. Cela conduit à la difficulté des actions de suivi et de contrôle du système d’approvisionnement.
Selon l’analyse du potentiel en biomasse et en bois à Madagascar en 2015, les résultats témoignent d’une forte variabilité des distributions de l’offre en bois selon les régions. Les potentiels en bois se concentrent plus particulièrement dans certaines zones de l’Est de l’ile. En termes de potentiel, par ordre d’importance, on retrouve en tête les régions Sofia, SAVA, Vatovavy-Fitovinany… Ces régions détiennent à elles seules une partie importante du potentiel total en bois/biomasse au niveau national (LRA, 2015).
Par contre, les plus gros consommateurs comme les régions Analamanga, Vakinankaratra et Haute-Matsiatra ne figurent pas parmi les régions qui ont un bon potentiel en ressources forestières. Ces chiffres confirment le diagnostic national mené en 2012, définissant notamment comme zones à risques ces régions, en termes d’auto-approvisionnement en bois énergie. La cause en est l’insuffisance de ressources par rapport à l’importance de la demande. Les ressources de ces régions se sont épuisées au fil des années en raison de leur surexploitation et de la forte croissance de la demande, qui a fini par dépasser l’offre.
Mécanisme de sécurisation foncière peu efficace
Compte tenu de l’importance de l’utilisation urbaine et périurbaine du bois énergie, l’offre n’arrivera plus à couvrir la demande des consommateurs dans plusieurs localités de la Grande île. L’insuffisance des ressources boisées est un des facteurs déterminants de ce déséquilibre. Dans ce cas-là, le reboisement, surtout à grande échelle, est incontournable. Dans plusieurs régions, les zones affectées à ce reboisement massif ne sont pas encore identifiées de manière précise et les procédures d’octroi de terrains restent peu claires, malgré la mise en vigueur de réserves foncières pour le reboisement. La promotion de mesures d’afforestation à grande échelle et à vocation énergétique, se heurte alors à des obstacles d’ordre juridique, institutionnel et spécifiquement liés au foncier. Il faut alors, sans plus tarder, procéder à l’identification et à la formalisation de ces terrains de reboisement, un facteur primordial pour sécuriser les investissements pour la mise en place de parcelles de reboisements à vocation de production, et pour motiver les acteurs voulant y investir.
Un cadre de référence
Sous le lead du ministère en charge de l’Énergie, en collaboration avec les différents secteurs concernés de la chaîne de valeur, une Stratégie nationale d’approvisionnement en bois énergie (Snabe) est finalisée à ce jour, et sortira officiellement d’ici peu. La stratégie devrait constituer un cadre de référence pour la gestion de la chaîne de valeur en bois énergie, à laquelle les acteurs concernés de la gestion durable viennent se greffer. À la suite de plusieurs séries de consultations menées par le consultant mandaté par le ministère de l’Énergie, la Snabe a été présentée aux principaux acteurs des institutions étatiques du secteur, tant au niveau central qu’au niveau régional pour validation technique, en juillet 2016. Cette stratégie sera un outil de gestion de la filière bois énergie au niveau national et comporte dix axes stratégiques importants. Voici quelques extraits des axes stratégiques de la Snabe:
• Concevoir et mettre en place des dispositifs incitatifs et appropriés, facilitant l’octroi de terrains, la sécurisation foncière et de l’investissement des actions de reboisement, surtout à grande échelle.
• Identifier et rendre opérationnel un mécanisme financier performant pour supporter la mise en œuvre de plantations à vocation bois énergie à l’échelle nationale.
• Augmenter la productivité en matière de production du charbon de bois à travers l’application des technologies améliorées.
• Rendre plus efficace et efficiente la consommation du charbon de bois à travers l’utilisation de foyers économes et les actions visant le changement de comportent des usagers.
La Snabe constitue un excellent point de départ théorique pour la pérennisation des ressources et de l’approvisionnement durable en bois énergie dans la Grande ile. Il reste à espérer qu’elle soit effectivement appliquée, et rapidement…
Page réalisée en collaboration avec le GRE.
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