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Bemiray –« Pour que la mer ne soit plus la limite de notre rizière »

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L’accalmie est précaire et lourde de menaces. Les Gabonais restent rivés sur ce que sera la couleur de la fumée qui sortira d’ici peu du sommet de la « Tour de Pise ».

Le président de la République, Philibert Tsiranana, durant la première élection présidentielle par le Parlement.

Le président de la République, Philibert Tsiranana, durant la première élection présidentielle par le Parlement.

Histoire – Trop de non-dits qui tronquent la vérité 

Les Gabonais qui réclament, à juste raison, la fin d’un « bongoisme » qui n’a que trop duré, ignorent que, quel que soit le vainqueur, eux-mêmes seront les grands perdants. Bonnet noir et noir bonnet, Ali et Jean, les beaux-frères ennemis sont, en effet, tous les deux, de purs produits de la même famille, et leur conflit digne du feuilleton Dallas ne date pas des dernières élections. Les ambitions de Ping remontent à longtemps, et il se chuchote- car cela fait partie des non-dits officiels- que c’est pour le calmer qu’il a été poussé en 2008 à la Commission de l’Union Africaine. Entre les deux hommes, il y avait non seulement des visées politiques identiques, mais surtout une femme : Pascaline, sœur d’Ali et ex-épouse de Jean. Cette ancienne directrice de cabinet d’Omar Bongo n’a jamais pardonné d’avoir été évincée du Palais, mais pas au point, semblerait-il, de se ranger du côté de son ex. N’a-t-elle pas exclu Ping du mariage de leur propre fille   Dallas dans toute son ignominie, et un pays qui se retrouve dangereusement au bord du gouffre de la guerre civile pour des histoires de famille qu’on essaie de taire et de dissimuler derrière la politique. Et la guerre, disait Paul Valéry, « c’est quand des gens qui ne se connaissent pas se massacrent pour le compte de gens qui se connaissent, mais ne se massacrent pas »…
Les non-dits lourds de conséquence, car déformant singulièrement la réalité, sont aussi légion dans l’Histoire de Madagascar, au point que les générations à venir n’auront plus connaissance que de vagues banalités. Les archives de 1947 ont beau être déclassifiées depuis 1997, personne ne se bouscule pour les consulter, préférant le confort du non-dit aux épines de la vérité historique. Le lieutenant Randriamaromanana était-il vraiment le héros que l’on croit, ou un simplet manipulé par une administration française à la recherche du coupable idéal pouvant justifier la répression à venir   Avril 1971 dans le Sud est, lui, une tragédie qui a, au bas mot, fait 3 000 morts. Là aussi le non-dit a été la règle, les exactions étant les tristes faits d’armes d’une gendarmerie commandée par un certain… Richard Ratsimandrava. Mai 1972, le général Gabriel Ramanantsoa décline le poste de Premier ministre proposé par un Philibert Tsiranana aux abois, et réclame les pleins pouvoirs. Tout ou rien. Comment ont bien pu se passer les tractations entre un fringant officier général qui a le vent en poupe, et un président vaincu par la maladie, sous l’œil dominateur du tout puissant général Bocchino, chef de
l’État-major particulier et porte-voix d’une France déjà décidée à tourner la page à son avantage   Comment écarter la possibilité d’un front commun entre lui et la providentielle solution de rechange qu’est le citoyen français Ramanantsoa   On ne le saura jamais, mais ce non-dit, le bon peuple n’en a eu cure, et les klaxons euphoriques retentiront jusqu’à très tard dans la nuit à Analakely. Ce n’est ni la première, ni la dernière fois qu’une Révolution est confisquée…

« Tsy hiamboha adidy aho, mon général » : le colonel Richard Ratsimandrava reçoit les pleins pouvoirs du général de division Gabriel Ramanantsoa en 1975.

« Tsy hiamboha adidy aho, mon général » : le colonel Richard Ratsimandrava reçoit les pleins pouvoirs du général de division Gabriel Ramanantsoa en 1975.

Présomptions
1975 est l’année de tous les mystères, et de tous les non-dits, car les présomptions de Coup d’État se sont enfilées à partir de là comme autant de perles. Le célèbre « Tsy hiamboho adidy aho, mon général » est certes passé à la postérité. Mais s’est-on jamais demandé ce qui a bien pu se passer préalablement dans les coulisses de l’Histoire, le promu répondait-il  vraiment à la logique d’un général en partance, membre de la très haute bourgeoisie merina   N’y aurait-il pas eu un passage en force quelque part comme disent les sportifs   Le colonel ne durera qu’une semaine au poste de nouveau chef de l’État, mais fort curieusement, malgré son assassinat, le terme « Coup d’État » n’a pas été prononcé une seule fois. Ceux qui savaient, les Roland Rabetafika, Appolinaire Andriatsiafajato, Père Ralibera, ou encore commandant Istasse, emportèrent leur secret dans la tombe. La loi du silence n’est pas que corse, motus et bouche cousue également pour les quelques témoins encore vivants : on circule, il n’y a rien à dire… La fulgurante ascension de Didier Ratsiraka prit, dès lors, une tournure très éthiopienne à la Mengistu avec la création d’un « Derg » militaire,  puis la politique du vide. La Révolution se nourrit de ses propres enfants, c’est bien connu…
L’Histoire ne pouvant se résumer en quelques lignes même à coup de silences, nous faisons un grand bond jusqu’à la crise la plus proche, celle de 2009 dont l’origine, selon certains fouineurs, n’avait rien de politique. Dallas version malgache en quelque sorte… Comment expliquer, en effet, ce rejet viscéral nourri par le « parrain » à l’endroit du « petit frère » du temps même où celui-ci n’était encore qu’un jeune chef d’entreprise débutant dans le métier, au point de faire arracher ses panneaux publicitaires   Des langues, peut-être pas si mauvaises, parlent d’un grave problème strictement privé, pour ne pas dire une offense subie par un des siens, que le « parrain » tel qu’on le connait s’est juré de ne jamais oublier, ni pardonner. On sait tous, pour en avoir vécu toutes les péripéties, où l’escalade entre deux aussi fortes personnalités nous a menés. Il y a, néanmoins, une justice à leur rendre : celle d’arrêter de dire avec dédain de l’un qu’il « n’est qu’un » ancien laitier, et de l’autre qu’il « n’est qu’un » ancien DJ. Tout simplement parce qu’ils ne sont pas « que » cela, et qu’à l’œuvre on s’est rendu compte que certains, autrement plus diplômés, ne leur arrivent finalement guère plus haut que la chaussette. Mais peut-être ne sommes-nous « que » Malgaches pour comprendre les success stories à l’américaine. Ils n’étaient « que » quoi, au fait, Rockfeller et Reagan ?

De nombreux tours opérateurs misent aujourd’hui sur les Tsingy de Bemaraha.

De nombreux tours opérateurs misent aujourd’huisur les Tsingy de Bemaraha.

Monde du voyage – Les tour-opérateurs réceptifs

Le TOP, Association des tour-opérateurs professionnels réceptifs de Madagascar, a vu le jour en 1991, mais chez les vénérables pionniers, Transcontinents a été créé bien avant, en 1953, et Madagascar Airtours, en 1968. Pour mieux introduire ce métier très spécifique de tour opérateur que se partagent les « émetteurs » des pays de provenance des touristes, et les « réceptifs » des pays de destination, un petit retour sur image peut s’avérer utile. Dès sa naissance au XIXe siècle, l’industrie du voyage liée au capitalisme triomphant brossait déjà les grandes lignes du tourisme moderne. Aujourd’hui, l’Allemagne et la Grande-Bretagne contrôlent les premiers TO d’Europe et même du monde, pour ne citer que TUI, Thomas Cook, ou MY Travel.
Comment travaille le TO réceptif   Il procède à l’identification de ce qui sera le produit à commercialiser, en tenant compte des tendances transmises par l’émetteur. Il travaille sur tous les paramètres pour ne citer que les vols, les hôtels, les excursions et visites, les transferts, propose une cotation dans laquelle il aura déjà défini sa marge, et l’envoie à l’émetteur. Ce travail pratiquement d’interface est, certes, menacé par l’E-commerce qui autorise une relation directe entre le client et le prestataire, mais fort heureusement, beaucoup de touristes tiennent toujours à cette assurance-qualité qu’offre le professionnalisme des TO.
Une nuance difficilement comprise par le grand public est celle existant entre tour opérateur et agence de voyages, d’autant plus que beaucoup d’entreprises cumulent les deux activités. Pour schématiser, le TO concocte un produit en négociant avec les prestataires, alors que l’agent de voyages est en quelque sorte un revendeur. Un volet important des activités des agences de voyages est aussi la billetterie ou « ticketing », pour laquelle les compagnies aériennes leur ont, pendant longtemps, octroyé une commission de 7%. Sous la pression de l’augmentation des coûts et de la concurrence des compagnies « Low cost », les transporteurs ont fini par renoncer à cette commission, amenant les agences à désormais pratiquer le « Service fee », c’est-à-dire à se faire payer directement par le passager.
Les TO réceptifs de Madagascar, tout comme les hôteliers, n’ont jamais cessé de travailler dur, même au plus fort des crises politiques de 2002 et de 2009, ou de la psychose du choléra durant laquelle certains médias étrangers laissaient presque croire qu’à Madagascar on mourrait à chaque coin de rue. Le contexte actuel n’est malheureusement pas plus facile, avec l’impact destructeur, pour un pays misant sur la découverte, de certains facteurs comme l’insécurité grandissante non seulement sur les routes, mais désormais aussi dans certains sites que l’on croyait préservés. La haute saison tire à sa fin, et les chiffres de 2016 risquent d’être en-deçà des attentes. Une fois de plus.

Les « garajnikis », symbole de la débrouillardise russe, abritent toute une activité économique.

Les « garajnikis », symbole de la débrouillardise russe, abritent toute une activité économique.

Savoir-Faire – Débrouille d’hier et de toujours

Le tas, quoiqu’on dise, est une excellente école pour ne pas dire la meilleure, pour peu qu’on y ait pour mentor ce petit quelque chose d’indéfinissable qu’on appelle parfois le talent. Le palais en bois de Manjakamiadana était, en son temps, le plus haut bâtiment d’Afrique avec ses 43 mètres, et Jean Laborde qui ne connaissait pratiquement rien du matériau utilisé en a monopolisé tout le mérite. L’historien Raombana, contemporain de Ranavalona Ire et auteur de plus de 8 000 pages manuscrites, a-t-il senti une usurpation quelque part   Toujours est-il que dans ses écrits, il s’est toujours abstenu de mentionner le nom du Gascon, mettant plutôt en avant des compatriotes comme Andriamparany, Ifaralahindafatra, Isoamanana, et surtout Rainitsontsoraka : ce dernier eut la lourde responsabilité d’improviser une grue métallique à la suite d’une défaillance lors de l’implantation du pilier nord-est. Plus tard, des jeunes gens passionnés de construction, connus sous le nom de « alinijery », gravitaient autour de Radama II. Avides malheureusement aussi de bonne… chair, ils furent décimés lors du massacre des « Menamaso » par les conservateurs de la Cour. Et lors des travaux de restauration du Palais mise sur rail à partir de 2005,  les instructeurs français n’en revenaient pas devant l’art –il n’y a pas d’autre mot- des ouvriers malgaches de reproduire à l’identique les outils spécifiques manquants. Ce fut, notamment, le cas d’une boudineuse servant à faire des ourlets sur les feuilles de zinc, dupliquée à la perfection par les Malgaches sur la base d’informations puisées sur internet. « Nous étions là pour leur donner notre savoir-faire, mais nous avons en fait aussi beaucoup appris d’eux… » Mais sans aller si haut, au propre comme au figuré, la rue offre au quotidien mille exemples de cette débrouillardise bien malgache, des garages de quartier aux «kalesy » à volant en passant malheureusement par les armes à feu artisanaux. Chaque médaille a son revers.
La débrouillardise peut être définie comme une capacité d’adaptation  née dans un contexte  de sous-équipement et de pénurie, raison pour laquelle, quoique plus ou moins prononcée selon les pays, elle n’a pas de frontière. En Russie par exemple, il y a les « garajniki » qui n’ont parfois plus de garages que le nom, et remontent à l’époque soviétique. Selon la sociologue Svetlana Barsukova, « l’économie de garage est plus qu’un gagne-pain, c’est un phénomène socioculturel. À l’époque des pénuries dans l’ex URSS, les garages étaient utilisés pour stocker tout ce qu’on gardait en pensant que ça pourrait toujours servir. On y cachait les matériaux volés au travail. Les vendeurs à la sauvette des années 1990 s’en servaient pour remballer, réétiqueter,  et entreposer leurs marchandises. Ce n’est que dans les années 2000 qu’ils sont définitivement passés dans le secteur informel ».
Les garajniki russes peuvent être aménagés aussi bien en étables qu’en pied-à-terre pour touristes, ou en ateliers de menuiserie ou de fourreur. De véritables petites industries s’y installent, depuis les meubles en PVC aux chaussures et aux vêtements. D’autres ont plutôt un penchant pour l’alimentaire, tel la boulangerie et la conserverie, ou pour les stèles funéraires. Il faut de tout pour nourrir la famille et élever les enfants, c’est « l’économie de garage », disparate, hétéroclite, et russe à souhait. Les revenus ne sont pas stables, mais certains parviennent à se constituer une clientèle fidèle, notamment, dans la réparation automobile. De mauvaises graines existent certes, elle n’hésitent pas à utiliser des branchements électriques pirates, trempent dans le recel, emballent et revendent des produits de contrebande. Elles ne constituent fort heureusement pas la majorité dans un secteur qui tient à son indépendance et à sa respectabilité.
Rien que dans un échantillonnage de neuf régions, il a été recensé près de 130 000 garajniki et pas moins de 17 000 types de production. Quand la santé des affaires le permet, ils n’hésitent pas à s’agrandir un peu à la manière des logements des 67ha ou de Soweto qui, de simples boites d’allumettes au départ, finissent par acquérir deux ou trois niveaux. Évoluant dans l’informel mais tolérés par les autorités, les garajniki échappent à l’impôt. Les autorités les laissent tranquilles, et se contentent de leur demander, de temps à autre, une participation pour le développement de leur… fokontany. Les problèmes surviennent quand la réussite se fait un peu trop criante. Ils sont alors obligés de régulariser leur situation et, en cas de refus, risquent la fermeture. Moralité, pour vivre heureux, rien ne vaut de vivre caché.
Retour à Tana où octobre, le mois du Jazz, pointe le bec de son saxo. Combien seront-ils, cette année encore, les brillants musiciens malgaches qui s’aligneront sans complexe avec ceux de l’international sans avoir jamais mis les pieds dans un quelconque Conservatoire de musique   La débrouille peut aussi être artistique, et tout est très bien ainsi…

Les produits préservatifs sont aussi nombreux que variés et c’est à qui comptera le plus de clients.

Les produits préservatifs sont aussi nombreux que variés et c’est à qui comptera le plus de clients.

Rétro pêle-mêle

 Les préservatifs sont fabriqués dans une matière poreuse comprenant des milliards de petits trous de 5 à 50 microns de diamètre. Ces trous empêchent effectivement les spermatozoïdes de passer, mais sont trop larges pour faire barrage au virus du sida. La magistrale démonstration ne vient pas d’une sommité scientifique à la tribune d’un colloque, mais du cardinal Gaëtan Razafindratandra. Un peu, diraient les mauvaises langues, comme si un brave paysan du Vakinankaratra décrivait avec minutie et conviction l’équipement de la station orbitale soviétique Mir… Le respecté homme d’Église n’a, néanmoins ,pas poussé le bouchon jusqu’à fournir le pourcentage précis de perte de « sensation » due à l’objet de cette polémique (on parle de 20% !), préférant retourner sur ses terres en prêchant l’abstinence et la fidélité. Il a fallu le passage du Dr Peter Piot, directeur exécutif du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/ sida pour ramener la sérénité dans les esprits.

Le Code de la Communication n’en finit pas de tourner en rond. Le document de base, élaboré par l’ancien ministre Mamy Rakotoarivelo, devenu, entretemps, député d’Antananarivo et vice-président de l’Assemblée nationale, est revu et corrigé par un atelier de journalistes tenu à Antsirabe sous la houlette de Haja Nirina Razafinjatovo, nouveau titulaire du poste. En ces derniers mois de 2003, il n’a toujours pas atterri à l’Assemblée nationale, encore moins au Sénat. Tout laisse à penser que la nouvelle Charte n’est pas près de voir le jour, et poursuivra longtemps son séjour dans les placards. La Communication est, en effet, réduite à une simple Direction au sein du ministère des Postes et télécommunications, dont le patron est davantage passionné par les nouvelles technologies de l’information.

Madagascar et l’île Maurice ont longtemps coexisté dans le cadre du Programme Tourisme de la Commission de l’océan Indien, sans que des indices d’une vraie volonté de coopération aient été sentis. De temps à autre, des groupes d’opérateurs malgaches partaient en voyage d’études sur l’île sœur, plus pour constater l’écart entre les deux pays qu’autre chose. Dans les Salons internationaux,  Maurice, La Réunion et les Seychelles se cotisaient pour  payer en partie la venue des deux miséreux de la zone qu’étaient Madagascar et les Comores, une situation vécue par beaucoup de professionnels malgaches comme une véritable humiliation. L’OTIOI qui devait prendre la relève du Programme de la COI avec son siège à Antananarivo, ne verra jamais le jour malgré l’optimisme de façade affiché par les ministres Roger Mahazoasy et Nando Bodha. Ce dernier, après une visite du Venta Club d’Andilana, eut la franchise de déclarer que ce fleuron de l’hôtellerie nosybéenne était du niveau d’un complexe mauricien des années 60.

Textes : Tom Andriamanoro
Photos : L’Express de Madagascar – Fournies


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