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Channel: Magazine – L'Express de Madagascar
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Bemiray – Quand Macron n’était pas (encore) Président

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Certains disent de lui que c’est un pur produit des magazines, et surtout de la page de couverture. Force est de reconnaître que cet énarque est une véritable « usine à intellection », et qu’il serait tout simplement dommage s’il ne prenait pas la responsabilité de faire connaître sa pensée, dans les magazines ou ailleurs. Lors de l’investiture, Laurent Fabius a eu cette phrase comme quoi pour être homme de son pays, il fallait d’abord être homme de son temps. Emmanuel Macron donne l’impression d’être plus encore, et d’avoir plusieurs longueurs d’avance sur tous les autres. Un visionnaire   Les quelques réflexions suivantes, qu’il a émises il y a un an déjà, auront le mérite de le faire mieux connaître et, pourquoi pas, de le prendre au mot.

-La France dans dix ans ? 
On ne dessine pas le visage d’un pays de manière subreptice, ou sans que son peuple le choisisse. La promesse à faire à la jeunesse ne consiste pas à lui dire ce qu’elle doit être, ni ce que doit être son pays dans dix ans, mais à lui donner la possibilité de choisir pour elle-même quand elle sera en responsabilité.
-Macron lui-même, où sera-t-il dans dix ans  ?
Pas la moindre idée.
-Vos  convictions politiques ? 
J’ai toujours exprimé un choix clair en faveur d’un libéralisme économique et politique, avec un socle de solidarité collective, de régulation, et la conviction que le principe de liberté rend plus fort. Concernant la communauté nationale,  je pense qu’on peut protéger, dans le plein respect des libertés individuelles. Je crois même que la vraie sécurité se construit dans la liberté des individus, sinon vous continuez à produire de la défiance.
-L’effort collectif  ?
L’effort collectif efficace suppose une compréhension collective du problème. Je crois pour ma part à l’intelligence du peuple. Il est prêt à la réforme profonde, à condition qu’on lui explique où l’on va, et qu’on lui rende compte de manière régulière.

Le mouvement « En Marche » a été le tremplin vers la présidentielle.

Le mouvement « En Marche » a été le tremplin vers la présidentielle.

-Le capital ?
Dans notre pays, on aime la rente, l’argent qui dort plutôt que celui qui produit, alors que nous avons besoin justement de plus de prise de risque. On n’aime pas l’enrichissement par le travail et le mérite individuel. Or, on ne peut pas avoir une vraie souveraineté industrielle et économique si on n’a pas un capital français.
-La délocalisation ?
La période récente a été marquée par deux phénomènes : la délocalisation de la production, permise au début des années 1980 par la mondialisation et son principal outil de transformation, le porte-conteneurs, qui a réorganisé les flux mondiaux ; et la transformation d’emplois industriels en emplois de service. Ces deux mouvements ont réduit la part de l’industrie et la capacité à produire sur notre territoire, parce que nous avons été attaqués par les pays à bas coûts. Ajoutons à cela nos propres erreurs, comme la réticence face à la robotisation par crainte de perdre des emplois. L’Allemagne a robotisé cinq fois plus que nous, l’Italie deux fois plus. Ils ont pourtant bien mieux préservé l’emploi industriel, car l’usage intensif de ces machines intelligentes a constitué un très bon anticorps à la délocalisation massive.
-L’Europe ?
L’Europe a été fondée sur une triple promesse : éliminer la guerre, faire prospérer l’économie, permettre à tous de circuler librement. Aujourd’hui, les gens ont le sentiment qu’elle nous fait souffrir plus qu’elle ne nous apporte. Ma conviction profonde est qu’elle est pourtant notre meilleure solution. Aujourd’hui, le risque terroriste concerne particulièrement la France ; et la question des réfugiés, la Grèce, l’Allemagne, l’Italie, la Suède, ou l’Autriche. Nous avons besoin de solidarité sur chacune de ces questions, sinon chaque pays sera seul à porter son fardeau. Deux choses manquent aujourd’hui à l’Europe : une vision globale, de long terme, proposant par exemple une plus grande intégration de la zone euro ou une véritable politique commune de gestion des frontières, mais aussi une efficacité concrète sur les sujets qui préoccupent les Européens. On le voit avec les débats actuels sur l’agriculture et la sidérurgie, mais aussi sur les migrants et la sécurité.
-2017 ?
La vraie chance, c’est qu’en 2017 il y a des élections majeures en France et en Allemagne. Nous devons utiliser cette synchronisation pour mener un débat européen et dire la vision que l’on porte. Il faut, dans les trois années suivantes, des changements de traité permettant d’aller au bout de cette vision. Refuser d’avancer, c’est se condamner à reculer. Si nous continuons à ne rien faire, l’Union et la zone euro se déliteront d’elles-mêmes.
-L’offre Macron ? 
C’est faire réussir la France dans un monde ouvert. Mon combat, c’est celui pour le progrès et la mobilité.
-Un mouvement pour réunir vos soutiens ? 
Je ne commente jamais les rumeurs.
-Qu’aurait dit de vous l’écrivain et chroniqueur de presse Michel Audiard ?
Heureux soient les fêlés, car ils laisseront passer la lumière.

Des jeunes taguant les murs du centre de sports à Fanzara.

Des jeunes taguant les murs du centre de sports à Fanzara.

Street arts – De Fanzara à Anakao    

Fanzara est un petit village espagnol d’à peine
300 habitants, promis à héberger une immense décharge publique mais devenue, par un de ces retournements de situation auxquels on ne s’attend pas, la capitale mondiale du graffiti. Il accueille désormais chaque année le festival d’art urbain le plus créatif du monde, grâce à la peinture murale qui a redonné vie à ses vieilles maisons décrépites. Pas facile au début de convaincre les « vieux » de laisser des artistes venus de nulle part se défouler sur leurs façades, mais les plus récalcitrants ont fini par céder. Quarante-quatre espaces ont ainsi été investis sans que la municipalité ne débourse un sou, les seules conditions imposées aux artistes étant qu’ils logent dans le village, et impliquent les habitants dans leur processus créatif. Le week-end, les touristes déferlent à Fanzara, plan en main et appareil photo en bandoulière, relayés en semaine par les collégiens. Quant à la presse internationale, même le New-York Times et le Guardian lui ont ouvert leurs pages. Les habitants pour leur part sont tous devenus des experts en tag, plus que fiers de l’être…
Et Anakao diriez-vous, qu’a-t-il à voir   Une aventure au moins aussi insolite que celle de Fanzara, à cette différence près qu’elle ne s’est pas inscrite dans la durée. À l’origine, un artiste de rue réunionnais, Jace de son nom …d’artiste, décida un beau jour d’aller se faire voir ailleurs. Il atterrit avec tout son matériel de taggeur dans le plus improbable ailleurs qui soit, à Anakao. Ici, pas de murs, pas de façades à barbouiller, mais qu’à cela ne tienne, il y a bien les voiles carrées des pêcheurs vezo. Et cela a marché, au point que la folie fut rééditée en 2013, cette fois-ci avec toute une armée de passionnés de tous horizons et de tous bords : on citera Julien Malland présentateur TV, Psyckoze et Cart One de France, Kid et Boogie de La Réunion, BO 130 et Microbo d’Italie, Aryz d’Espagne, sans oublier le partenariat d’Air Madagascar et des peintures Mauvilac. Au montage financier se trouvait Sami Chalak, en collaboration avec les agences Tec Tec et Alefa Production.
Les artistes ne se limitèrent point à leurs bombes de peinture, mais poussèrent l’audace jusqu’à utiliser les pigments locaux et le goudron d’étanchéisation des coques. Expérience concluante. La population eut droit à un défilé de voiles inspirées et bariolées qui rompait pour un moment inédit la monotonie de leur ordinaire. Un reportage très professionnel a bien sûr été réalisé, et diffusé dans de nombreux pays. Sauf Madagascar ?

Le pape François a célébré la messe marquant le centenaire de l’apparition de la Vierge Marie à Fatima, Portugal.

Le pape François a célébré la messe marquant le centenaire de l’apparition de la Vierge Marie à Fatima, Portugal.

Religion – La cabale des dévots

Beau, le voyage entrepris tout récemment au Portugal par le Pape François, à l’occasion du centenaire de l’apparition de la Vierge à deux petits enfants de dix et neuf ans. Beau, d’autant plus que des centaines de milliers de croyants venus de toute l’Europe ont tenu à être de l’évènement, dans un haut-lieu des pèlerinages catholiques. Et si, là où elle est, la douce Marie avait ce jour-là une petite larme à l’œil   C’est qu’il n’y a pas si longtemps de cela, comparé à toute l’éternité, on raconte qu’elle est aussi apparue à un paysan malgache lambda dans un village dont elle n’a pu retenir le nom compliqué parlant de menue monnaie, comme l’offrande des petites gens. Depuis, Anosivolakely est devenu comme un micro-Fatima non homologué, et pour cause, par la pesante et docte hiérarchie. Quant à Ra-Patrice, le paysan qui, depuis, s’est consacré corps et âme à sa nouvelle vocation, il a été assimilé à la cohorte des bonimenteurs faiseurs de « sectes » dont il se fabrique, régulièrement dit-on, treize à la douzaine. Mais sait-on au moins de quoi on parle, en prononçant ce mot devenu un terme fourre-tout
Que 100 000 croyants se donnent rendez-vous sur la Place Saint-Pierre de Rome pour guetter un balcon, que des quartiers entiers de Lourdes soient transformés en foire aux gadgets religieux, que lors de la visite de Benoit XVI la ville de Valence se soit tapissée de milliers de bannières frappées d’un « V » comme Vatican, et de banderoles clamant « Benoit, tu es l’envoyé de Dieu », il n’y a là rien que de chrétiennement correct. Mais qu’un évangéliste réunisse les siens hier dans la poussière d’Antanikatsaka, aujourd’hui dans le confort plus actuel du Coliseum, voilà que les pierres se mettent à pleuvoir dru. Et pourtant, il ne prêche ni le rejet de la divinité de Jésus comme les Témoins de Jéhovah, ni l’existence d’une deuxième Bible  comme les Mormons, ni l’abolition de la Trinité comme un certain « ambassadeur autoproclamé de Yaoshua », encore moins l’inquiétant ésotérisme de l’Église de scientologie ou la croix à l’envers des satanistes.

Ra-Patrice a témoigné de l’apparition de la Vierge  à Anosivolakely.

Ra-Patrice a témoigné de l’apparition de la Vierge à Anosivolakely.

Irrationnel divin
Alors que lui reproche-t-on au juste, outre le fait de ne plus se reconnaître dans les Églises traditionnelles où le conformisme et la routine ont pris toute la place au détriment d’une spiritualité réellement vécue   Tel « converti » a fini par avouer qu’à plus de cinquante ans il ne savait toujours pas prier puisque dans son temple, « c’est le pasteur qui se charge de tout », on lui demande juste de suivre. Une messe évangélique au contraire est plus participative, et est simplifiée au maximum : une première partie pour la louange, et une deuxième pour la prédication. On a quand même noté des efforts méritoires chez certaines Eglises pour revaloriser cette spiritualité en péril, pour ne citer que le « Fifohazam- panahy katolika ».
Quelques points fondamentaux séparent néanmoins Églises « aînées » et Églises « cadettes », et ils n’ont guère beaucoup de chance d’être  aplanis. Le baptême des enfants, effectué pratiquement par procuration par les familles, n’existe nulle part dans la Bible. Chez les « aînées », ce sont plutôt le « katekomena » protestant et le « konfirmanda » luthérien qui se rapprochent le plus d’une vraie préparation à l’esprit du vrai baptême, puisque s’adressant à des personnes conscientes de leur engagement. La dime, ce catalyseur de toutes les critiques qui y voient une basse manœuvre d’exploitation, est aussi et quoique on dise, d’origine biblique (Genèse 14 :20, Malachie 3 :10 entre autres références). Mais contrairement à toutes les caricatures, elle est recommandée mais pas coercitive, et on n’a jamais assisté à l’exclusion d’un paroissien pour n’y avoir pas souscrit. Rien n’empêche d’ailleurs un protestant ou un catholique de la verser dans sa paroisse, si telle est sa conviction personnelle. Quant à la croyance aux miracles enfin, il n’est pas besoin de rappeler que la Bible, texte fondamental de la foi chrétienne, est une apologie de l’Irrationnel divin, des premières pages de la Genèse aux
dernières de l’Apocalypse. Comment ne pas croire à son message, le tourner même parfois en dérision, tout en se prétendant chrétien ?  Pour être logique avec soi-même, mieux vaut dans ce cas se convertir à cette très belle philosophie de vie qu’est le bouddhisme, et ne plus en parler. Amen.

Lettres sans frontières

Joseph Ntap Ngoupou
In  À l’aurore de la vie

De la main droite je poussai le portail
Un bruit strident déchira l’air.
Les invités, assis en rond sur la terrasse,
Comme un seul homme, tournèrent la tête.
Assise en retrait, elle dominait les autres convives.

Quand nos yeux se croisèrent
Un sourire radieux et silencieux illumina son visage.
Ses joues s’arrondirent.
Une fossette se creusa à la commissure de ses lèvres.
La lèvre inférieure, telle la lune dans son premier quartier,
Se replia sue elle-même,
Laissant entrevoir une denture fluorescente.
Du blanc de ses yeux jaillissait une lumière pure.
La tête se pencha d’un quart en arrière.
Elle ne fit sortir aucun son audible.
Mais tout son corps, tendu par une joie indicible,
Projetait tout alentour des rayons invisibles.

Au-delà du sourire
Un paysage aux mille couleurs m’apparut.
Les roses et les marguerites, entraînées par le zéphyr,
Dansaient joyeusement côte à côte.
Des herbes géantes couvraient la vallée fertile.
Par endroits des épineux barraient l’accès.
Au sommet de la colline un flamboyant gai trônait.
Le bourdonnement des abeilles et des libellules
Faisait régner sur les lieux une atmosphère de fête foraine.
Sur les escarpements de la colline, un torrent enflammé
Lançait avec fougue ses écumes au ciel.
Un parfum de puissance et d’amour indomptés
Se mouvait au-dessus de ce paysage généreux.

Ma contemplation ne dura qu’un moment.
Je regardai derechef son visage :
Elle avait refermé subrepticement la porte de sa « maison ».
Je sus, l’instant d’un sourire,
Que sous sa nonchalance, son silence, sa froideur,
Une grande âme, prisonnière des apparences,
Cherchait avec avidité à se matérialiser.

Le temps d’un sourire, un sourire sorti des profondeurs,
Et l’âme s’illumine, tel un diamant sous le soleil de midi.

Comme il serait merveilleux de vivre sa vraie vie
En ce bas monde !

BE6Rétro pêle-mêle

Eugène Lechat, ancien vice-président de la République, s’éteignait en mai 2008  dans sa bonne ville de Mananjary dont il a longtemps été le maire. Enseignant de formation, il avait le profil parfait du militant de l’ancien parti socialiste français SFIO (Section française de l’Internationale ouvrière), et a tout naturellement adhéré au PSD (Parti social démocrate) de Philibert Tsiranana des années 60. Il était devancé dans les hautes sphères malgaches par deux autres Français, Paul Longuet et Marcel Fournier, nommés ministres à l’avènement de la République en 1958. Gravissant tous les échelons, il réussit admirablement son assimilation au point d’adopter sans s’offusquer le surnom de « Rapiso ».
Un des meilleurs ministres des Travaux Publics que Madagascar ait connus, celui qui n’était pourtant « qu’instituteur » contribua efficacement à la réalisation des objectifs des Plans quinquennaux. C’est sous Eugène Lechat qu’était par exemple inauguré l’aéroport d’Ivato auquel il refusa fermement le nom d’Ivato-le-Grand que certains voulaient donner à cette réalisation. « Ce sont les tsars de Russie qui aiment se parer de ce genre d’attribut », aimait-il dire. Le port de Toamasina bénéficia des premiers travaux de modernisation grâce à un partenariat avec le port de New-York. Avec son collègue de l’Éducation nationale Laurent Botokeky, il dota presque tous les chefs-lieux de sous-préfecture de Collèges d’enseignement général (CEG).
Comment les Malgaches ont-ils pu accepter d’avoir pendant si longtemps un ministre français, propulsé par la suite à la vice-présidence de la République   Peut-être parce qu’on était encore en plein régime néocolonial, perpétué dans presque toute l’Afrique francophone comme au Sénégal, où la paire Abdou Diouf-Jean Colin a longtemps paru indéracinable. Peut-être aussi parce que la Première République était synonyme d’un bien-vivre dont le souvenir est resté dans les esprits. Mais par-delà la politique, « Rapiso » était réellement malgache de cœur, et sa dernière volonté d’être inhumé à Ambalavao Tsienimparihy a été respectée par la famille.

Textes : Tom Andriamanoro
Photos : Andry Randriamaro – AFP 

 

 


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