Quantcast
Channel: Magazine – L'Express de Madagascar
Viewing all articles
Browse latest Browse all 659

Élevage – La filière caprine en voie de redressement

$
0
0

Les régions Anosy et Androy affichent des résultats probants dans l’élevage de chèvres avec près de 100 000 têtes traitées. La filière caprine se présente comme une issue sécurisante face à la pauvreté criante, l’insécurité alimentaire et la malnutrition.

L’heure est à la relance de l’économie régionale dans le Grand Sud surtout dans l’Anosy et l’Androy. Outre l’élevage de bovins, la filière caprine tend à devenir porteuse d’espoir. Ces régions possèdent du potentiel en matière d’élevage et abritent les chèvres « Capra Aegagrus Himus » résistantes aux conditions climatiques du Sud.
Le paysage de la filière se redessine grâce à l’appui de l’agence de coopération allemande GIZ Madagascar.
« Nous avons décidé de valoriser la filière caprine par l’approche chaîne de valeur afin d’améliorer la résilience de la population rurale face à l’insécurité alimentaire », évoque Ndriamahery Mandimbilaza Rasamoelina, responsable de la filière auprès de la GIZ Madagascar, antenne de Fort-Dauphin.
Faisant partie du programme Amélioration de la sécurité alimentaire et augmentation des revenus agricoles (ASARA), le projet est cofinancé par l’Union européenne et le ministère fédéral de la Coopération et du développement de l’Allemagne (BMZ).
À ce jour, les données recueillies promettent déjà en enregistrant une baisse de 40 points, en pourcentage, du taux de mortalité des jeunes chevreaux, passant de 60% à 20%.
« Ce résultat est le fruit de nos campagnes de vaccination et de déparasitage », précise le responsable.

Les produits à base de chèvre permettent d’augmenter la valeur ajoutée.

Les produits à base de chèvre permettent d’augmenter la valeur ajoutée.

Retombées économiques
En effet, la filière caprine constitue une source de revenus, d’emplois et de sécurité alimentaire pour les paysans. Avec les 200 groupements d’éleveurs, dix unions fonctionnelles et une Fédération des unions des éleveurs des caprins, 4 602 ménages ont été bénéficiaires de l’appui, en 2015-2016. Dans ce cadre, 100 000 caprins ont été traités et identifiés par des boucles codées aux oreilles. Cette campagne de traitement a touché deux districts, dont Bekily avec dix communes et Ambovombe avec neuf communes. Pour 2016-2017, Tsihombe et Amboasary Sud ont été ajoutés à la liste.
« À la fin de cette année, nous ambitionnons  d’encadrer 6 000 éleveurs dont 1 200 femmes chefs de ménage, et d’avoir 168 000 caprins traités et marqués », fait savoir notre interlocuteur, avec optimisme.
En termes d’amélioration du niveau de vie, ce type d’élevage fait augmenter de plus de 30% les revenus des ménages. Au fil des années, 100 000 boucs castrés et 50 000 jeunes boucs ont été déjà vendus sur les marchés national et international. Parallèlement, les paysans se lancent dans la transformation afin de gagner plus de valeur ajoutée. Outre les fromages de chèvre, mille kilos de mortadelle et de salami ont été mis sur le marché régional.
« Les débouchés existent. Des contrats de vente ont été, par exemple, signés entre les unions et les coopératives de collecteurs avec une livraison périodique de 200 têtes par mois vers le marché national. Une première livraison a été effectuée au mois de mars dernier », affirme Ndriamahery Mandimbilaza Rasamoelina.
Il reste donc à profiter des opportunités et à pérenniser effectivement cette filière caprine dans les deux régions de l’Anosy et l’Androy pour que le spectre de l’insécurité alimentaire y recule.

Les foires incitent à la consommation locale de la viande caprine.

Les foires incitent à la consommation locale de la viande caprine.

Problèmes – Des contraintes à surmonter

Les indicateurs virent au vert et montrent le dynamisme du secteur. Mais malheureusement, l’enclavement des communautés concernées perturbe l’essor de la filière. Encore faut-il rappeler que les infrastructures routières font partie des biens publics nécessaires pour tirer les investissements, sources de croissance économique   En raison de l’état des routes, le prix du caprin reste faible et les marges bénéficiaires des éleveurs se rétrécissent.
Le problème d’approvisionnement en eau vient à son tour assombrir le tableau. En saison sèche, l’herbe ou la paille ne contient plus que 10 à 15% d’eau alors que les besoins des chèvres en eau, augmente.
« Le manque de sources d’eau à boire va impacter les risques sanitaires dus à la transmission de maladies contagieuses bactériennes, virales ou parasitaires. Pourtant, les animaux doivent pouvoir s’abreuver à l’aide de dispositifs accessibles et adaptés. Donc, la construction de points d’eau par village à gestion communautaire est impérative », commente notre interlocuteur.
À cela s’ajoute le vide réglementaire, spécialement pour les petits ruminants, relatif au recensement, à l’identification, à la circulation ainsi qu’à la commercialisation. Néanmoins, la plateforme caprine tente actuellement de mettre sur pied une proposition de texte à soumettre au ministère en charge de l’élevage.
Enfin, le problème d’occupation de terrain qui sévit chez les éleveurs du Sud menace de créer des différends sérieux dans l’alimentation des chèvres. Une précision est attendue au niveau de la politique de l’État sur l’utilisation des terrains de production. Une caractérisation de l’espace pastoral et l’espace cultivable s’avère nécessaire afin d’éviter le différend entre agriculteurs et éleveurs.
« La gestion communautaire de ces espaces par la conception d’un plan d’aménagement local serait une solution alternative », propose Ndriamahery Mandimbilaza Rasamoelina.

L’identification par boucle codée aux oreilles assure  la traçabilité du caprin traité.

L’identification par boucle codée aux oreilles assure
la traçabilité du caprin traité.

Revenus – Un prix volatile et des profits prometteurs

Le prix du caprin dépend de la situation de la production agricole. Il baisse durant la période de soudure qui, généralement, s’étale de septembre à avril. Certes, le prix est volatile mais il suit une trajectoire ascendante, particulièrement pour les boucs castrés engraissés. Si le kilo vif était de 2 600 ariary, en 2015, et il atteint les 6 600 ariary, actuellement. De même, le prix minimum d’un bouc castré engraissé s’éleve à 400 000 ariary, contre 200 000 ariary il y a deux ans.
« Le prix moyen d’un caprin a connu une augmentation de 50% depuis 2015 », précise Ndriamahery Mandimbilaza Rasamoelina.
Cette situation permet aux éleveurs d’accumuler plus de revenus. À titre d’illustration, un éleveur qui commence avec douze caprins génère un revenu d’un million d’ariary après une année et demi d’exploitation.
Quoi qu’il en soit, ces résultats augurent un avenir prometteur pour la filière ainsi que pour les ménages. L’espoir de sortir de la pauvreté intergénérationnelle se profile à l’horizon.

Qualité et traçabilité
Cependant, comme tout produit, la maximisation des profits nécessite une amélioration de la qualité. Tout dépend de l’alimentation et de l’hygiène dans le secteur de l’élevage. Les paysans appuyés par le projet ont planté 460 ha cajanus avec 5 000 kg de grains de semence ainsi que 15 ha de cactus inermes. D’après notre interlocuteur, l’amélioration alimentaire du caprin passe par la technique de l’ensilage et du foin pour les deux régions. Par ailleurs, « nous avons mis en place un système de vérification de la qualité des chèvres issues de l’élevages pour une garantie de qualité pour les consommateurs. Il s’agit de l’identification par boucle codée par chèvre, suivie de la mise en place d’un cahier par éleveur. Ces outils assurent la traçabilité du caprin traité », explique Ndriamahery Mandimbilaza Rasamoelina.

L’élevage caprin débute par l’achat de deux chevreaux.

L’élevage caprin débute par l’achat de deux chevreaux.

Entre exportation et effets pervers

Le marché des caprins est vaste. En termes de demande internationale, le besoin annuel du Liban est d’un million de têtes. Et selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), environ 60 % de la viande rouge consommée à travers le monde provient de la chèvre. Pour les deux régions dans le Grand Sud, l’exportation vers Les Comores et les pays arabes est déjà en phase d’étude. Aussi, la mise en place du BOVIMA (Bonne Viande de Madagascar) catalysera l’essor de la filière. Par conséquent, celle-ci peut être source de devises pour l’économie nationale et booster le développement de l’Anosy à travers la valorisation du port Ehoala et la création d’emplois. Toutefois, cette démarche peut conduire à une flambée des prix sur le marché local. Taolagnaro en a vécu l’expérience avec une augmentation soudaine du prix du kilo de crevettes. Il importe donc de réfléchir sur une meilleure organisation de la filière caprine dans son ensemble pour ne pas pénaliser la consommation domestique.

La plantation de cactus sans épines permettrait de résoudre le conflit entre éleveurs et agriculteurs ainsi que l’alimentation des caprins.

La plantation de cactus sans épines permettrait de résoudre le conflit entre éleveurs et agriculteurs ainsi que l’alimentation des caprins.

Textes et photos : Moïse Fanomezantsoa 


Viewing all articles
Browse latest Browse all 659