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Environnement – Planter des arbres et construire en harmonie avec la nature

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Et si on se mettait à planter des arbres, et à s’en occuper, sans attendre les « cérémonies officielles » de reboisement   Faire comme Kartik Paramanik, un Indien de 75 ans qui, depuis l’âge de 10 ans, n’a cessé de planter des arbres partout où il peut. Et cela dure depuis  soixante-cinq ans. Avec une moyenne de plus de 300 arbres par an. Pour sauver la Planète et en préserver la Nature, Luc Schuitten, un architecte belge, lui, rêve de construire sans toucher à l’architecture de l’environnement naturel. Son idée est de faire épouser aux bâtiments la forme et les contraintes de la Nature.

Quand il était enfant, Kartik Paramanik écoutait son père lui raconter des histoires.
« À quoi bon faire un pèlerinage   Ce n’est pas en te rendant dans un lieu sacré que tu deviendras propre et pur. Si tu plantes simplement un arbre, cela t’apportera bien plus de bénédictions que n’importe quel pèlerinage. » Les paroles de son père trouvèrent une profonde résonnance chez le jeune garçon. À 10 ans, il commença à semer des arbres. Il planta le premier à l’embranchement de trois routes. Aujourd’hui, à 75 ans, il continue inlassablement ses plantations.
Kartik vit dans le village de Tarapur Thutapara, sur la frontière de l’Inde, à une quarantaine de kilomètres de la ville de Nawabganj, dans le district de Chapai Nawabaganj [le plus oriental du Bengladesh]. Avant la partition de l’Inde, sa famille habitait un autre village. La plupart de ses proches parents ont fini par passer la frontière pour s’installer en Inde. Mais son père, lui, est resté et a simplement déménagé dans un autre village.
À une certaine époque, les gens avaient des ampoules aux pieds à force de marcher dans la chaleur torride de cette région dénuée d’arbres. Ils ôtaient le gamucha qui leur protégeait la tête pour s’en envelopper les pieds, meurtris par la terre brûlante. C’est là que le petit Kartik a planté ses premiers arbres. Peu à peu, cette étendue de terre pelée et aride a commencé à se peupler d’arbres.
Avec l’âge, la passion de Kartik pour les arbres n’a cessé de croître. Kartik était coiffeur. Dès qu’il gagnait quelques sous, il mettait systématiquement une petite somme de côté. Avec ses économies, il achetait des plants et les mettait en terre à différents endroits, puis entourait les jeunes arbres de clôture de bambou. À ses moments perdus, il allait s’occuper de ses protégés, les arrosant et sarclant tout autour. Certains le prenaient pour un fou, mais, sourd à tous les sarcasmes, il garnit peu à peu les villages avoisinants d’arbres. Le désert devint une oasis de verdure. À ce jour, ce sont près de 20 000 arbres qu’il a mis en terre.

Bénédiction
Ses premiers semis sont aujourd’hui d’immenses arbres qui étirent au sol leur ombrage généreux. Chacun est le résultat de son travail opiniâtre, de ses soins, de sa sueur et de sa persévérance. Il y en a partout et de toutes variétés : des banyans, des bombax, des margousiers et divers fruitiers. Ils ont surgi sur les bords de route, aux coins de rue, sur les places de marché, dans les cours d’école, autour des lieux de prière, le long des camps frontaliers, partout. La main verte de Kartik a laissé sa trace sur toute la région.
Les arbres ont été une bénédiction pour son village. Aux abords de l’école et de la médersa, certains ont été vendus et l’argent a servi à construire un mur autour du terrain de prière. Des parents nécessiteux ont également pu vendre les arbres devant chez eux pour payer le mariage de leur fille. Chaque semaine, les marchands installent leurs étals sous l’ombre fraîche des arbres de Kartik. Mais Kartik, lui, n’a jamais demandé un sou pour son travail. Son œuvre est un acte d’amour.
Vers la fin 1984, Tariqul Islam était auxiliaire médical lorsque son métier le conduisit dans cette région. Il devait parcourir de longues distances à pied, interrompant souvent son voyage pour se reposer et s’abriter de la chaleur au pied d’un arbre. Un jour, il a appris que les innombrables arbres qui traçaient sur sa route un chemin de verdure de dix ou douze kilomètres, étaient le fruit du travail et du dévouement de Kartik. Stupéfait et admiratif, il demanda à rencontrer le coiffeur. Tariqul est aujourd’hui professeur associé d’économie dans un lycée de la région.

« Une bonne route asphaltée »
Le 2 décembre 2003, un article publié dans journal bengali Prothom Alo sous le titre
« Chacun de ces arbres majestueux est un hommage à Karti », attira l’attention du maire de la municipalité de Rajshahi. Celui-ci reçut Kartik Paramanik pour le féliciter. En 2007, la chaîne de télévision Channel I offrit à Kartik une distinction agricole. Lors de la cérémonie de remise du prix, le général de division (à la retraite) Anwarul Iqbal, qui était à l’époque conseiller par intérim du gouvernement, interrogea le vieil homme sur ses ambitions. « Je ne désire rien pour moi-même, mais il faudrait une bonne route asphaltée pour relier mon village aux zones voisines, répondit le vieil homme. Tout ce que je veux, c’est cette route. » Le service local des Ponts et chaussées a construit une route de sept kilomètres, qui arrive jusqu’au seuil de la maison de Kartik.
En 2013, le récit de l’initiative de Kartik a été intégré au manuel d’anglais de 5e du programme scolaire national sous le titre
« Un homme qui aime les arbres ». Il y a quarante ans, Kartik Paramanik a semé un banyan en bordure de route à Sahapara. C’est aujourd’hui un géant, et le lieu a pris nom de Sahapara Bottola (l’ombre du banyan de Sahapara). Des boutiques sont apparues sous l’immense ombrage du banyan qui abrite désormais un bazar grouillant d’activités. « Ce bazar s’est développé et s’est étendu grâce au banyan qu’a planté Kartik, souligne l’un des commerçants, Serajul Islam. C’est aussi grâce à lui que la route a été construite. Nous lui devons beaucoup. »
Dans la région, tout le monde doit beaucoup à Kartik Paramanik. Mais lui n’a que faire de cette gratitude. Il se passionne davantage pour les jeunes plants et les arbres. Il continue de sillonner la région avec sa bêche et ses semis, plantant un arbre ici, un autre là. Il n’aura aucun répit tant que chaque centimètre carré de la région ne sera pas recouvert d’une canopée de verdure.

Anwar Hossain (Prothom Alo – Bangladesh)


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